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Le Globe, 7 août 1880

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Le Globe
7 août 1880


Extrait du journal

Ils remplissent le dimanche, vêtus de leurs plus beaux habits, la nef de leur vieille église délabrée du douzième siècle ; et quand ils marient leurs enfants, ils in vitent le curé du village à bénir le lit nuptial. Le curé vient et bénit; puis il prend un verre devin et un biscuit et s’en retourne accompagné des remerciements et des espérances de la lamille. Les gens de terre le saluent, quand ils le rencontrent, mais ils ne lui demandent pas de ces ser vices où se reconnaît la foi antique. Or, je • vous l’ai dit, messieurs les conservateurs, ce sont les gens de terre qui ont voté ici et qui votent constamment contre les institutions républicaines. Hier, la mer était admirable de calme et de sérénité sous le plus bel azur qui se voie jamais en ces contrées. Une heure après le coucher du soleil elle brillait en core d’une lumière argentée qui avait pour les yeiix peu accoutumés à ce spec tacle, une douceur inexprimable. Les mâts des grands bateaux de pêche se voyaient distinctement sur la ligne courbe où le ciel touche à la mer. Les petits ba teaux étaient montés sur le rivage. Je dis à la femme du pécheur, mon propriétaire : <( Voilà une belle nuit. Les femmes sont sans inquiétude par ce temps-là. » — « Trop beau temps, me répondit-elle ! On ne gagne rien à pêcher dans cette merlà. » « Eli quoi ! lui répondis-je, le poisson ne se montre-t-il que par le mauvais temps?» — « Non ! mais il faut du vent pour faire aller le bateau qui traîne le filet. Le ba teau, c'est une charrue, et le vent, c’est le cheval qui traîne la charrue. Pas de vent, pas de mouvement pour le bateau, et pas de mouvement, pas de pêche ! » Je vous prie, mon cher conservateur, de méditer cette réponse de la femme du pêcheur. La liberté, les élections, les mouvements du suffrage universel, le souffle de la République, c’est le vent ! Point de vent, point de récolte, ni sur la terre ni sur la mer! Tranquilles dans vos demeures bien closes, vous dites quel quefois, pensant aux pauvres pêcheurs, quand le vent souffle : « Ils sont bien à plaindre ce soir. » Mais eux et leurs fem mes courageuses disent : « Allons ! on fera de l’ouvrage cette nuit et nous au rons bonne pèche demain ! » Quelquesuns périssent, il est vrai, quelques-unes demeurent veuves avec leurs enfants orphelins. Alors on maudit le vent et tout le village est dans l’affliction ; mais tout le village redemande le lendemain ce vent nécessaire qui nourrit la commune et permet encore d’aider la famille éprou vée. Langlade....

À propos

Fondé par Adolphe Coste en 1871, Le Globe était un journal républicain qui se donnait pour mission d’« instruire son lectorat », et de lui apprendre à tirer le meilleur de la nouvelle situation politique en France après l’Empire – souvent d’un point de vue économique. Ce journal ouvertement cynique sera publié jusqu'en 1938.

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