Extrait du journal
FABX3, 7 MAI. l'arm i les idées étranges que M. Marie exposait hier à la cham bre, on a pu en remarquer une qui avait au moins sur la réforme électorale le mérite de la nouveauté. M. Marie reprochait à la com mission d’enquête la .mollesse avec laquelle elle avait procédé ; il prétendait qu’elle était un tribunal, et que nul n’aurait eu le droit de récuser les citations directes qu’elle aurait données. Avant de dire un mot do cette doctrine renouvelée de la conven tion, nous ferons observer que ce n’est pas l’envie d’être forte et re doutable qui a précisément manqué à la commission d’enquête. Elle a commencé par prendre une grosse voix et par menacer tout le monde; M. d’Haussonville a montré hier qu’elle avait agi comme les présidons de la police correctionnelle ont même le bon sens et la modération de ne pas agir, soumettant des tierces personnes à des inquisitions injurieuses et légèrement diffamatoires, et s’expo sant au juste ressentiment des familles blessées dans leur moralité. Si l’on avait voulu croire la commission, elle né se serait pas con tentée de remplir les fonctions de procureur du roi et de juge d’ins truction, elle aurait encore rempli celles de gendarme ; mais elle a reculé devant l’idée de monter à cheval à ses frais. Sans cela la commission n’aurait pas seulement jugé, elle aurait encore em poigné. M. Marie disait donc que la commission était un tribunal, et que nul n’avait le droit de ne pas déférer à ses citations. Dire est bien, mais prouver est mieux. Si M. Marie avait cité la loi qui oblige le Eublic à considérer les commissions de la chambre comme des tri unaux, il aurait beaucoup plus avanâê le triomphe de ses idées. Mais le nombre, le rang, le titre et les attributions des tribunaux français étant généralement connus, il est difficile d’en fabriquer de nouveaux pour le besoin de ses doctrines. La convention, elle, fai sait tout ce qu’elle voulait ; elle avait un argument irrésistible, dressé en permanence sur la place de la Révolution. Elle pouvait donc envoyer des commissaires en province et dans les ar mées , et leur donner toute l’autorité nécessaire à l’accom plissement de ses desseins ; mais, Dieu merci, la chambre des députés n’est pas la convention ; aucune loi ne lui confère le droit de former des commissions judiciaires et des tribunaux. Si la chambre a le désir de se rendre compte d’un fait ou de faits quel conques, elle est la maîtresse de choisir dans son sein une commis sion chargée de lui en rendre compte; mais cette commission n’a aucun pouvoir coercitif : elle aurait beau citer des personnes à com paraître devant elle, ces personnes ne seraient aucunement dans l’obligation de lui obéir. Nous trouvons même qu’on a oublié de rendre des actions de grâces à celles qui ont eu l’extrême obligeance de se présenter devant la commission d’enquête et de répondre à ses interrogatoires, surtout si l’on n’a pas prélevé sur les quarante mille francs que vous savez de quoi leur rembourser leurs Irais de voya ges. Si les personnes mandées avaient refusé de comparaître, la com mission et la chambre elle-même se seraient trouvées fort penau des, car on ne peut pas se dissimuler que cette enquête a été or donnée avec une incroyable légèreté. M. Marie et quelques autres se croyaient très forts, parce qu’ils faisaient valoir cet argument : « Puisque la chambre a nommé une commission d’enquête , elle a nécessairement voulu lui accorder tous les moyens d’arriver à la vérité. » Ce prétendu argument est une absurdité pure et simple; il ne s’agit pas de savoir ce que la chambre a voulu, mais ce que la chambre a pu. La volonté de la chambre peut n’avoir pas de limites, mais son pouvoir en a. Le pouvoir de la chambre ne peut pas aller jusqu’à s’attribuer les fonc tions judiciaires, hors le cas de violation de ses privilèges et d’in jures qui lui sont adressées, et qu’elle a le droit de juger et de pu nir. Elle ne peut pas lancer des mandats d’amener ou de comparu tion contre des citoyens dont ses membres ne sont pas les juges...
À propos
Le Globe était un quotidien guizotiste dirigé par Adolphe Granier de Cassagnac, partisan d’une monarchie tempérée par une Constitution et deux chambres. Journal politique défenseur de la Monarchie de Juillet et du suffrage censitaire, il fut publié de 1837 jusqu’à 1845. Cette tribune politique orléaniste sombra peu avant la chute de Guizot, trois ans avant la Révolution de 1848 et la fin de la Monarchie en France.
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