Extrait du journal
Perle, 7 octobre. Nous n’avons pas voulu nous expliquer sur l’ordonnance du 4 octobre qui fait remise de leur peine a un certain nombre de condamnés politiques, avant d’avoir lu les articles des journaux de l’opposition sur ctd acte de la clémence royale. Nous savions bien d avance ce qu’ils diraient, mais nous voulions qu’ils eus sent fait connaître leur pensée avant de faire connaître la nôtre. On verra pourquoi. Voici l'appréciation du Siècle : « L’opinion publique ne peut pas demeurer insensible à cet acte d’hu manité, qui, à l’égard de plusieurs condamnés tout au moins, sera con sidéré comme une tardive réparation. Avant de se résoudre à devan cer pour eux le terme légal de la pe.ine, le ministère ne s’était pat fait scrupule de l'aggraver. En infligeant aux détenus politiques, contre le vœu et même au mépris de la loi, les tortures de l'emprisonnement so litaire, les prescriptions ministerielles avaient altéré la santé des uns et la raison des autres. M. Duchâtel rend la liberté à ceux qui ont survécu, à la bonne heure ; mais quelle consolation le ministère réserve-t-il aux familles de ceux qui ont péri? « La forme de cet acte soulèvera de justes critiques. Pourquoi établir des catégories et choisir entre les condamnés! Un acte pareil de clé mence n’a rien de royal. On fait grâce à des détenus qui se sont tendus coupables de délits communs. A fégard des détenus politiques, il n’y a qu’un procédé vraiment digne et vraiment grand, c’est l’amnistie. En cela, comme dans sa poUtique extérieure, on dirait que le ministère du 29 octobre s’attache à faire regretter le ministère du 15 avril. a La clémence qui veut s’imposer au respect du peuple ne doit s’in spirer d’aucun motif égoïste, ni d’aucune raison d'intérêt.On reconnaîtra difficilement à l’ordonnance du 4 octobre ce caractère d’abnégation. Nous ne sommes pas plus habitués à trouver M. Guizot conciliant et généreux envers les partis qu’a le voir déployer dans ses relations avec les puissances étrangeies la fermeté qui sied au représentant de la Fran ce. Lors donc que l’on voit sa politique intérieure s’humaniser et se dé tendre, on cherche naturellement à savoir quel genre dé profit il peut re tirer de ce changement. » Écoutons le Courrier français : « Le ministère est à bout de son courage : il tremble devant ses fautes, il capitule avec là popularité. L’ordonnance du château d'Eu n’est pas une œuvre de miséricorde et de clémence, c’est un calcul. La mesure des humiliations et des fautes était comble ; il fallait accorder une sa tisfaction à l’opinion indignée, on lui jette une ombre d’amnistie. Cette amnistie dérisoire, attendue si vainement, si imprévue aujourd’hui, n’est que le rachat des hontes de Taïti, des traités du Maroc, du voyage à Londres ; c’est la rançon du ministère devant les chambres. M. Guizo' a cru faire un coup de maître, en jetant dans le plateau où se pèsent ses destinées la liberté de quelques captifs. Le droit de grave a fait les frais d’une combinaison d’intérêt ministériel, et la clémence royale elle-même, exploitée dans un but égoïste, a perdu sa grandeur en perdant sa spon tanéité. Il est donné à M. Guizot de tout compromettre, la dignité de la France comme la miséricorde de la royauté. « Certes, le pays se réjouira de voir cesser des infortunes qu’aucune raison d’Etat ne pouvait plus justifier. En France, la pitié publique s’at tache volontiers a ceux qui souffrent pour leurs principes et pour leurs croyances, et l’œuvre de la justice, en se prolongeant sans nécessité, finissait par se réduire aux proportions d’une misérable vengeance. Mais si le résultat matériel de l’amnistie est accueilli avec joie par le pays, il jugera avec sévérité les secrets motifs de cette clémence tardive. Faire à propos est une des grandes habiletés des gouvernemens, et jamais me sure ne fut plus dénuée d’à-propos que l’octroi de grâces inspiré par M. Martin (du Nord). Il semble que le ministère dise au pays : grâce pour grâcè, amnistie pour amnistie. Ce n’est plus un don, c’est un marché. » Nous avons entendu l’opposition insignifiante, c’est-à-dire le Siècle; l'opposition extravagante, c’est-à-dire le Courrier fran...
À propos
Le Globe était un quotidien guizotiste dirigé par Adolphe Granier de Cassagnac, partisan d’une monarchie tempérée par une Constitution et deux chambres. Journal politique défenseur de la Monarchie de Juillet et du suffrage censitaire, il fut publié de 1837 jusqu’à 1845. Cette tribune politique orléaniste sombra peu avant la chute de Guizot, trois ans avant la Révolution de 1848 et la fin de la Monarchie en France.
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