Extrait du journal
deaux, en un mot le siège du gouvernement français transporté momentanément à Londres, n’est-ce pas là un assemblage de faits en dehors de la vie réelle et politique de l’Europe au dix-neuvième siècle? Et ne convient-il pas de donner à cet assemblage le mot de comédie; comédie-héroïque, si l'on veut, où le chœur, e cst-à-ilirv la moralité, se mêle constamment et finalement à l’action scénique? 11 est impossible de ne pas reconnaître, dans le voyage de M. le duc de Bordeaux en Angleterre, u.ie manifestation préméditée du parti légitimiste : nous disons à dessein préméditée, parce que cette manifestation n’est pas la conséquence de ce voyage, parce que, contrairement aux premières assertions de la Gazette et de la Quo tidienne, ce voyage n’a pas été entrepris parle prince dans le but instructif d'étudier l’organisation politique et industrielle de l'An gleterre. Savez-vous pourquoi les légitimistes, après avoir visité individuellement jusqu’ici la famille déchue au fond de l’Allemagne, se sont décidés tout-à-coup à se rendre, en foule, auprès du préten dant, en choisissant Londres, comme le lieu le plus favorable à une démonstration de parti ? C’est parce qu’il était devenu urgent pour ce parti de faire diversion à un événement grave dont le retentis sement dure encore en Europe. Cet événement, dont on a cherché d’abord à atténuer la portée, c’est l’entrevue qui a eu lieu au châ teau d’Eu, de la reine d’Angleterre et du roi des Français. Dans la joie que lui cause ce qu’elle appelle les présentations royales, la Ga zette ne s’est-elle pas écriée, ces jours-ci : « Les splendeurs du château d’Eu s’effacent devant la magnificence des lovaux gentils hommes français qui se pressent dans les salons de BelgraveSquare? » La reine d’Angleterre s’étant rendue en France, afin d’honorer une grande nation dans la personne de son monarque, les hommes influons qui dirigent M. le due de Bordeaux n’ont trouvé, par con séquent, rien de plus ingénieux et de plus satisfaisant que de faire la contrepartie du voyage royal de septembre. La ville d’Eu s’est trouvée, pendant quelques jours, la capitale de deux grands royau mes : Londres est devenue, à son tour, la métropole de deux gran des nations. Mais quel rôle aurait joué la Gazette, elle qui s’est montrée la trompette la plus retentissante de la manifestation royaliste de Belgrave-Square, si celle manifestation ne prouvait absolument rien en faveur des principes de la Gazette, et si même elle prouvait con tre la cause que défend ce journal? Car voici précisément la mora lité rigoureuse, inexorable, qui reste des intrigues royalistes dont la résidence du duc de Bordeaux a été le foyer ! Vous avez publié des listes pompeuses des nobles, des marchands et des laquais pré sentés à votre souverain ; vous ne nous avez fait grâce ni des phra ses plus ou moins françaises, ni des larmes de M. de Châteaubriand; vous avez même exploité la monomanie d'un illustre écrivain, en obligeant ce vénérable vieillard à nous entretenir pour la centième fois de ses années, de sa mort prochaine, et de la tombe préparée pour le recevoir; vous avez fait saluer M. le duc de Bordeaux roi de France par des pairs, par des députés, au mépris du serment qui les lie au gouvernement de la France ; vous avez essayé de semer, sinon le désordre matériel, du moins le désordre moral, dans une nation heureuse et prospère; vous nous avez dit que tout ce que la France a d’illustrations dans la politique, dans les arts, dans les sciences, dans les lettres, dans l’armée, dans l’industrie, se trou vaient actuellement entre les quatre murs du salon de réception d’un prince exilé; vous avez crié bien haut que vous aviez pour vous le droit, et avec le droit, le talent, et avec le talent, le nombre! Et votre souverain, au lieu de trôner aux Tuileries, fait de la mo narchie dans une hôtellerie d’Angleterre ' Et les ministres du der nier gouvernement de la Restauretion quittent la France sur un or dre d une autorité qui n’existe ni de droit, ni même du fait ! Et les représentais sortis des rangs légitimistes qui siègent à la chambre...
À propos
Le Globe était un quotidien guizotiste dirigé par Adolphe Granier de Cassagnac, partisan d’une monarchie tempérée par une Constitution et deux chambres. Journal politique défenseur de la Monarchie de Juillet et du suffrage censitaire, il fut publié de 1837 jusqu’à 1845. Cette tribune politique orléaniste sombra peu avant la chute de Guizot, trois ans avant la Révolution de 1848 et la fin de la Monarchie en France.
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