Extrait du journal
cises, s’éclairciront. L’Assemblée jugera ; toutes les parties de l’Assemblée jugeront, toutes criti queront et toutes voteront. (Très bien ! très bien ! aux centres.) Ce sont là les motifs qui nous ont décidés. Il y a un dernier motif, je dirai peut-être le plus respectable de tous : c’est le besoin de l'accord. ( Marques d'approbation mêlées d’applaudisse ments sur un grand nombre de bancs.) Et cet ac cord, je voudrais, je le répète, l’étendre. Dans ce pays, messieurs, que reste-t-il aujour d’hui ? *“ Il reste cette Assemblée et celui qu’on a appelé son délégué. Ce litre, je l’accepte, je m’en honore; car il contient l’expression de votre confiance. (Très bien ! très bien ! au centre droit.) Mais comment ce délégué peut-il gouverner sans une majorité dans cette Chambre ? Or, qu’il y ait ici une majorité, la plus grande possible, c’est toute la question de notre salut ; car moj, que vous avez honoré du titre de votre délégué, je ne puis plus rien , rien , si cette Assemblée est coupée en deux. (Marques d’as sentiment.) Eh bien, je le dis franchement, j'ai des opinions très arrêtées sur toutes choses. Je ne suis plus à luge du scepticisme et des incertitudes, je suis à l'âge des idées arrêtées. En général dans ma longue et laborieuse vie, j’ai éprouvé peu d’indé cision dans ce qu'il y avait à penser et à faire ; j’en éprouve aujourd'hui moins que jamais. Eh bien, dans mes pensées les plus arrêtées, à moins qu’on ne me demandât le mal, — ce qu’on ne peut pas me demander ici, — à moins qu’on ne me demandât de manquer à mes engagements, — je ferai de grands sacrifices pour l’accord ; car s’accorder, c'est faire tout simplement qu’il y ait un gouvernement. Or, dans l’état du monde, dans l’état de notre société, il n’y a de gouvernement légal que celui qui s’appuie sur les représentants du pays, en tâchant de les réunir, de les rallier dans la plus grande majorité possible. (Très bien! très bien 1 — Applaudissements.) Il y a dans les propositions de votre Commis sion telle expression que je regrette, moins pour ce quelle contient que pour les interprétations qu'elle peut recevoir. Il y en a que je voudrais n’y pas voir : il y en a que je voudrais y voir plus précises. Peu importe, le fond y est, et le fond est celui-ci : Vous ne vous séparerez pas, vous, sans avoir donné au pays quelques institutions qui lui permettent de s’abriter derrière un gouvernement régulier. (Très bien ! très bien ! sur un grand nom bre de bancs.) Le spectacle auquel nous avons assisté dans le sein de la Commission, les trente membres qui la composent, et nous deux, membres du Gouverne ment, M. le garde des sceaux et moi, ce specta cle, il se reproduit ici. Nous avons été d’abord en désaccord au premier exposé de nos opinions ; en nous rapprochant, le désaccord s’est, je dirai amoindri. Quelques esprits conciliants se sont en tremis, et ont ess -yé de nous rapprocher. L’ac cord a semblé se faire ; il s’est détruit tout à coup ; puis il s’est refait au dernier moment. J'es père qu'il se refera de nouveau ici, s'il était ébranlé de nouveau. C’est le sort de toutes les négociations. On discute, on est près de s’accorder, on rompt et l’on revient à l’accord définitif, parce qu’il est né cessaire. (Sourires approbatifs. — Très bien ! très bien !) Eh bien, Messieurs, je viens ici m’adresser à tous les hommes de sens et de bonne foi, — il n’y a que ceux-là ici, — et leur demander ce qu’ils feraient à ma place. Quelle est la situation ? Dans notre pays où tant de révolutions ont passé, où tant de gouverne ments se sont élevés et ont été précipités dans l’abime ; où tous, sans exception, ont été essayés et ont laissé des représentants ; le grand malheur de la situation, le plus grand, le plus réel, c’est la division. (C’est vrai !) En bien, tous ces partis divers, on peut les résumer en deux principaux : les uns, — crovaut que la monarchie, qui, il faut le reconnaître, a fait la France, qui pendant douze siècles l’a ré gie, est son gouvernement naturel, nécessaire, inévitable, — ont la plus ferme conviction ; ils ne croient pas à la République,ils s’en méfient. Rien n’est plus respectable que ces convictions quand elles sont éclairées, sincères, et il n’y a qu’à en tenir le plus grand compte. D’autre part, Messieurs, il y a des hommes, non pas tous jeunes, non pas tous entraînés par les illusions de l’àge, mais très sincères qui. voyant le mouvement actuel des sociétés euro péennes, croient très sincèrement à la Répu blique, la désirent et y voient ce que, je vous l’a vouerai, j’y vois souvent moi-même, un des moyens les plus énergiques, et les moins sus pects de maintenir l’ordre. (Très bien ! très bien! à gauche.) Eli bien, ces deux partis existent, on ne peut pas le nier. Plus ils sont sincères, plus ils sont, je ne dirai pas, hostiles ; j’espère que nous mar chons de la tolérance religieuse où nous sommes arrivés à la tolérance politique que j’invoque. Je voudrais qu’il y eût une divinité chargée de ce soin; je l’appellerais parmi nous : la tolérance des opinions. Eh bien, Messieurs, cette tolérance, elle nous fait défaut, et plus la sincérité est grande, plus on est antagoniste, je ne dirai pas ennemi. Eh bien, ces deux grands partis que j’ai ici devant moi, mon Dieu I ils se sous-divisent en core. Les hommes respectables qui veulent la monarchie, je ne dirai pas qu’ils sont divisés, si le mot les blesse, et je ne veux les blesser à aucun degré ; mais tous ne dirigent pas leurs vœux vers la même monarchie. Ici même (mon trant les bancs de la gauche), où il y a moins de division... (Légère interruption), il y a telle répu blique qui ne convient heureusement pas à un grand nombre d’entre eux (Sourires approbatifs.) - Cela est vrai. - Eh bien, mettez-vous à la place du Gouvernement, que voulez-vous qu’il fasse ? quelle conduite voulez-vous qu’il tienne ? S’il est un peu clair, un peu trop clair dans ses déclarations, sur-le-champ l’un des deux grands partis se dit maltraité, il est irrité ; 1 autre est sa tisfait. (Rires d’adhésion.) Si le gouvernement, conduit et inspiré par ce que j’appelle la tolérance politique, parce que c’est le devoir d’un gouvernement de ménager toutes les opinions, si le gouvernement est moins précis, moins net, on lui dit qu’il se réfugie der rière l’équivoque. Eh bien, messieurs, je vous de mande comment il faut faire ? L’équivoque ! Quelquefois on a vu dans un gouvernement, notamment dans la monaichie constitutionnelle, un ministère voulant rester aux affaires, et, pour éviter les difficultés, se couvrant de l’équivoque. Je le demande à votre bonne foi, à...
À propos
Fondé en 1869, Le Guetteur de Saint-Quentin et de l’Aisne affiche très vite son indépendance totale vis-à-vis de l’État en tenant haut le drapeau de la démocratie. Profondément pacifiste, le journal est convaincu que l’entente des peuples doit passer par une démilitarisation multilatérale. Il paraît jusqu’en 1914.
En savoir plus Données de classification - thiers
- dufaure
- edmond delière
- paris
- bordeaux
- france
- versailles
- saint-quentin
- europe
- loire
- aisne
- chambre
- fontainebleau
- la république
- l'assemblée
- république française
- parti républicain
- journal officiel
- gouverne
- banque de france