Extrait du journal

Cette scène renfermait en elle toutes les fraîches jouissances d’une vie d’indépen dance et de liberté. La vision des rues étroites, des maisons élevées, du bruit des usines, de la fumée noire, passa devant ses yeux... elle respira longuement. — Assez pour aujourd’hui, conclut Flavie, nous y reviendrons plus tard. Mais dès le lendemain Séverine reprit le sujet entamé la veille. — Quand parlons nous ? dit-elle avec brus querie. — Te voilà donc décidée à partir... ma pauvre Marjolaine, ce sera dur. Une larme brilla dans les yeux de Flavie qui continua : — Je ne crois pas le consentement du père difficile à obtenir, l'absence du voisin Verdrel lui fera un grand vide, pourvu... Elle n'acheva pas, le respect lilial faisant partie de l’héritage maternel. — Il y aura de mauvais côtés, dit résolu ment Séverine, malgré tout, c’est le mieux. 11 faut que François et Joseph surtout soient tenus, notre insiituteur se fait vieux et en prend à son aise. — Je retrouverai ma place de directrice d’atelier et gagnerai davantage. Le père tra vaillera au tissage, ce sera plus sam, plus gai que sa cave. Pour la seconde fois, les sœurs eurent un frisson de crainte secrète, mais elles ne se la communiquèrent pas. — Quand devons-nous partir? répéta Sé verine. — Je pense qu’on peut attendre septembre. Les travaux seront finis et nous tarons nos provisions. Si le père y consent, les choses peuvent s’arranger ainsi. — Attendons une occasion pour lui en parier. La Marjolaine répondit oui presque gaie...