Extrait du journal

Il ÿ a bien, lui dit Sir Edward Grey, un petit point noir à l'horizon en ce qui concerne les relations austro-serbes. Mais cela ''n'offre guère de gravité Quarante-huit heures plus tard, le petit point noir devenait une nuée orageuse formidable, d'où devait pleuvoir le sang. Alors enfin les yeux de Sir Edward Grey s'ouvrent. Et il faut lui rendre cette justice qu'il multiplie les efforts de. conciliation, comme il a multiplié les signes d'imprévoyance. n télégraphie, intervient, propose, adjure. Il fait tout ce qui est diplomatiquement possible pour-prévenir le terrible conflit sauf peut-être la seule chose qui l'eût, prévenu et qui eût consisté à dire à l'Allemagne < Si la guerre éclate, l'Angleterre sera avec ses flottes aux côtés de là France et de la Russie. Il s'en est expliqué avec, franchise, disant 'que l'opinion britannique n'était pas prête et ne l'eût pas suivi. Et ceci montre l'importance, dans les grands conflits mondiaux, du facteur moral. Il ne suffit pas que l'armée ou la flotte d'un pays soit en état de combattre 11 faut aussi. que ̃"•" l'âme du pays y soit préparée. Par ailleurs, dès que la neutralité -de la Belgique eut été violée, Sir Edward Grey se révéla à la hauteur de la situation. C'est lui qui, au cours du conseil de la couronne, éleva la voix pour demander que l'Angleterre jetât dans la balance du droit le poids de son épée. n alla jusqu'à menacer de donner sa démission si les autres ministres suivaient l'avis de M. Lloyd George, qui préconisait la neutralité. Cette fois, il incarna l'autre Angleterre celle pour laquelle les traités conclus ne sont pas des chiffons de,papier. Cette fois, il symbolisa le devoir, la loyauté, la fierté. Cela suffit pour que la France, ne se souvenant que de ce qu'il fit pour défendre la justice outragée, s'incline avec respect _devant son cercueil....