Extrait du journal

C'était Hector Pessard, causant avec ses amis du cercle de la critique dramatique, devant la porte du théâtre Déjazet, un soir de répétition générale. Il se plaignait d'ordinaire. On avait pris coutume de le plaisanter sur des' maux qu'on croyait imaginaires. Pourtant, cette fois-là, on ne rit plus. On le-sentait touché. A quelques jours de distance, on le rencontra encore à la répétition générale des Demi-Vierges, au Gymnase. On ne le vit plus le soir de la première représentation. Evidemment, puisque ce critique, qui donnait par son assiduité l'exemple à ses confrères, ne se trouvait pas à son fauteuil, quelque chose de grave se passait. Une souffrance était venue qui décourageait même sa conscience. Depuis, le doux et spirituel homme qu'était Hector Pessard n'a plus paru dans les salles de spectacle. A peine pouvait-il reconduire jusqu'à sa porte les amis assez audacieux pour ne pas l'attrister par leur visite, car il se jugeait dès longtemps perdu. La mort, amenée par une affection des intestins intéressant jusqu'à la vessie, a eu raison de son courage et de sa belle humeur. Hector Pessard est mort hier, à quatre heures vingt du matin, trop tard pour ceux qui furent témoins des souffrances de oet homme qui,aimait tant la vie et se refusait à la voir comme cruelle et douloureuse; assez lentement aussi pour ne pas s'être en allé .sans les baisers de son fils, militaire, éloigné de Paris, à Beauvais....