Extrait du journal

Nous avons, en France, le respect de la mort. Nous l'avons à Paris, que je prends pour exemple. On est frappé, en parcourant nos cimetières, de la propreté des tombes. On voit qu'elles sont souvent visitées, et entretenues avec soin. Beaucoup d'entre elles sont entourées d'arbustes et de fleurs fréquemment renouvelées. Je ne parle pas des tombes fastueuses, mais de la tombe du pauvre. Le jour des morts, toute la population est là. Elle y est recueillie, attendrie. Ce n'est pas une mode, c'est un sentiment. Quand les convois passent dans les rues, chacun* s'arrête et se découvre. Les convois d'indigents sont parfois accompagnés d'une foule nombreuse. Ce sont les plus touchants, les plus émouvants. Cémôrfva se reposer pour la première fois. Il est entouré de ses compagnons de travail et de misère. Il avait des amis; sa misère n'était donc pas complète. Quand un orphelin suit le char funèbre, il y a là, près de lui, des amis, des compagnons du mort, qui songent déja à le remplacer, sans autre motif que l'impulsion de leur bon cœur. Ce sera un enfant de plus dans cette chambre où le pain n'est pas toujours assuré. Il sera traité comme tous ses frères. Il n'y a rien de plus navrant que les funéraillés-i elles sont le secret de la vie, mais il n'y a rien de plus rassurant et de plus fortifiant que le respect dont on les entoure....