Extrait du journal
Il y a quelques semaines, par exemple, une dépêche de Néw-York vint nous apprendre qu'un milliardaire anjglo-amériçain, M. Andrew Carnegie, .'avait décidé de se débarrasser d'une partie de sa fortune et que, pour commencer, il donnait vingt-cinq millions pour là création de soixante-cinq, librairies publiques dans la cité de NewYork. Ce fut à travers le monde comme un coup de foudre. Un milliardaire qui rend ses millions, songez donc, c'est plus rare, par les temps qui courent, qu'un souverain qui abdique ou qu'un président de République qui démissionné.l Les philosophes réfléchirent, les philanthropes applaudirent et les caïoiftiérs frissonnèrent d'espérance. Puis ce fut tout. Le silence se fit, et la jupedu temps retomba sur l'admirable bout de jambe qu'avait exhibé l'histoire de ce commencement de siècle. Dieu sait pourtant si le reste du corps serait idéal à contempler! Dieu sait s'il y aurait des détails exquis à savourer! Je viens d'ailleurs, vous proposer d'en explorer quelques-uns de compagnie. Donc, M. Carnegie, ayant atteint sa soixante-septième année, se sentit las et fatigué. La fantaisie le prit, un beaù matin, de savoir combien il pouvait posséder d'argent, et il décida de réaliser son petit ayqjr quinze jours plus tard, il eut la satisfaction d'apprendre qu'il avait un milliard et demi de francs à sa disposition juste ce qui manquait l'autre jour à ce pauvre sir Michael Hicks Beach pour boucler son budget! M. Carnegie regarda autour de lui et ne vit que des héritiers lointains, aussi intéressés qué peu intéressants il pensai qu'en leur léguant 500 millions, il les mettrait à l'abri de la misère pour le restant de leur vie, et il décida de dépenser tout le reste de sa fortune avant de mourir, ce qui en supposant qu'il vive encore treize ans, jusqu'en l'an de grâce 1914 -représente, capital et revenu compris, plus de cent millions par an. Ici commença pour M.. Carnegie l'ère des difficultés. Il s'aperçut avec déséspoir qu'il, lui était presque plus facile de gagner cent millions par an que de les dépenser. Il manquait totalement d'imagination à cet égard. Il avait passé toute sâ vie à amasser des richesses, et il lui était dur, sur ses vieux jours, de changer brusquemen^de métier et d'apprendre,à les éparpiller; En supposant, d'ailleurs, qu'il s'assît à sa table de travail et qu'il distribuât deux billets de banque de cent francs par minuté, à chaque minute du jour et de la nuit, tous les jours et toutes les nuits de sa vie dimanches et. fêtes légales com-pris 7 il n'arriverait pas à se débarrasser de son milliard avant de rendre le dernier soiipir. Fut-il jamais impasse plus cruelle, infortune plus imméritée?....
À propos
Lancé en 1883 sur le modèle du quotidien britannique le Morning News, Le Matin se revendiquait être un journal novateur, « à l’américaine ». Son directeur Alfred Edwards entendait donner « priorité à la nouvelle sur l’éditorial, à l’écho sur la chronique, au reportage sur le commentaire ».
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