Extrait du journal

LAviLMPirani Les villes empoisonnées dont je parle ne se distinguent des autres villes par rien de remarquable, si; ce n'est par le nombre extraordinaire des petits convois d'enfants que l'on mène au cimetière et par les larmes innombrables des mères qui les accompagnent. Mais ces villes ne sont point dans la désolation quand on parcourt les rues, on n'est point arrêté par l'aspect sinistre des gens et des choses comme dans les villes frappées d'épidémie où sévirait, par exemple, le choléra. Nul ne s'intéresse au fléau qui s'est abattu sur le ville'; et de ce que des milliers d'enfants meurent empoisonnés, les grandes personnes ne s'émeuvent point. On n'en. parle même pas. Les journaux ne tiennent pas, par de lugubres statistiques, le public au courant du mal qui fauche lés générations en herbe. Les mères sèchent leurs larmes, ont d'autres en- fants, leur font boire le même poison, les conduisent au même cimetière .Quant aux çè-res, quelques-uns deviennent conseillers municipaux et recommandent bien aux empoisonneurs d'indiquer sur leurs récipients de mort le degré du poison vendu, de telle sorte que l'on puisse se rendre un compte exact de ce que coûte un cadavre d'enfant....