Extrait du journal

Rarement nation fut plus mystifiée que ne le fut la nôtre dans l'organisation de ces chemins de fer. En vain, depuis l'origine, les voix les plus dignes d'être écoutées s'élevèrent pour montrer que le bon sens commandait à l'Etat, ou de garder ou de reprendre son réseau de voie ferrée Lamartine et presque tout le parti républicain sous LouisPhilippe Proudhonsous l'Empire, Gambetta à l'Assemblée nationale. Si le Français est né malin, c'est une qualité qu'il n'apporte pas dans ses affaires d'argent. Notre glorieux peuple a, pour les financiers,qui l'exploitent, des can^ôurs d'assemblées d'actionnaires. On lui a persuadé que les sacro-saints principes de l'économie politique et la nécessité de limiter le nombre des employés d'Etat (comme si ceux des grandes compagnies n'en avaient pas tous les caractèrés) obligeaient à livrer nos véritables routes nationales, celles où courent les locomotives, aux mains des financiers les plus avides; et l'on entend encore nombre de nos commerçants, tondus jusqu'à l'épiderme parles grandes compagnies, déclarer que tout serait perdu si l'Etat exploitait les chemins de fer. Ainsi se sont constituées nos grandes compagnies, d'abord, sous le régime de Juillet, par la toute-puissance de la richesse; puis, dans la nuit sanglante qui suivit le 2-Décembre, à la faveurdes opérations inconnues, cachées dans le grand silence du despotisme enfin, sous la troisième République, d'abord par les soins de l'Ordre Moral, et en second lieu par ces fameuses conventions, qu'un ingénieur fort modéré...