Extrait du journal

Le théâtre du Gymnase nous promet une Manon Lescaut, renouvelée d’un admirable roman , d’une mauvaise comédie, d’un ballet malheureux et de cinq ou six vaudevilles oubliés. L’aventure équivoque et charmante de Desgrieux renferme tout ce qu’il faut, pour séduire des écrivains qui comptent beaucoup sur la bonne grâce, le port de tète et la souplesse d’un acteur. Le comédien sauvera peutêtre les singulières défaillances du personnage,—-et avec lui, sans doute , l’esprit de la scène arrangera le cœur du roman. quant à Manon, il nous est impossible, avec la meilleure volonté , avec la meilleure llalteriê du monde, de l’entrevoir dans la douce et hère personne de Mme Rose Chéri. Manon Lescaut, c est Lisette, avec des infidélités qui ressemblent à la fois à des plaisirs , à des passions , à des infortunes et à des vices; c’est Frétillon, avec une bonté cl un cotillon féroces : c’est une fille mal habillée et courte vêtue par en haut et par en bas -, c’est une femme curieuse jusqu’à h fatigue . toujours trop pressée pour songer a renouer sa ceinture; quand elle n’est point ivre, elle est folle : elle cherche tour à tour des tètes de clous et des pièces d’or dans le ruisseau ; elle se lue pour vivre ; elle va au fond de tout, jusqu’à ce qu’elle trouve le dernier mol du roman de l'abbé Prévost. Le théâtre du Gymnase a une perle , et il nous menace de la faire fondre dans du vinai...