Extrait du journal

I Dieu ! me répondit-il, il est vrai que de geindre çà n’v fait ni chaud ni froid, mais ça soutient les cours et c’est toujours bon ! — Geignons donc, puisque c’est là le fonds et le tréfonds de la diplomatie rustique. Cependant, la bise a beau se faire aigre, le froid glacer de blanc le man teau verdoyant de la prairie, il ne manque pas de voix refusant de se mêler à ce chœur des malcontents. Les chansonnettes des oiseaux, frais débarqués, protestent contre ces ex plosions d'humeur chagrine. Je ne sais si c’est parce qu’en vieillissant je les écoute avec plus de charme, mais il me semble que jamais rossi gnols, fauvettes, linottes et pinsons ne se sont montrés aussi joyeusement babillards, le coucou aussi prodigue de ces appels lointains qui, venant de la profondeur des grands bois, ressemblent si bien aux cris de re connaissance des sentinelles. Ils ont raison et nous ne perdrons rien en empruntant celte philosophie con fiante à ces humbles créatures; ce n’est point un mauvais regain de froidure qui arrêtera l’aiguille au moment où elle va marquer l'heure de la résurrection sur le cadran des saisons ; le bonheur de l’entendre sonner ne doit point laisser de place à de vaines appréhensions. Ab ! l’admirable spectacle que ce réveil de tout ce qui vit, et qu’il faut plaindre les infortunés qui volontai rement manquent à ce lever de rideau et le sacrifient à des vanités mon daines ! G. de Cherville....