Extrait du journal
Je regrette bien, je vous assure, de ne pas être en rapports avec un des membres de la municipalité de la ville de Saint-Denis. J’aurais lait le vert et le sec pour obtenir une invita tion à la grande cérémonie d’inaugu ration du baptême civil et il est très probable que je n’auuais pas regretté mon après-midi. L’avantage de n’être rien dans les légumes, c’est qu’on peut quelquefois se faire une pinte de bon sang et rire à se tenir les côtes sans que cela tire à conséquence. Demandez plutôt à M. Poubelle si je n’ai pas raison. Vous comprenez que M. le Préfet de la Seine n’aurait pas demandé mieux que de s’offrir un peu d’agré ment en assistant à des exercices au trement rigolos que les séances de l’Hôtel-de-Ville. Mais voilà, on est attaché au rivage par sa grandeur, et le pauvre préfet s'est cru obligé de laisser le maire de Saint-Denis opérer tout seul sur les petits mômes des citoyens socialistes. Tan* pis pour lui, ma foi. Je sais bien qu’à sa place, j’aurais eu rude ment de peine à me refuser le plaisir de voir un de mes maires baptiser les moucherons, et je crois bien que j’au rais, pour la ciiconstance, oublié pendant un jour qu’une mairie n’est pas une baraque de champ de foire. Nous en avons vu de bien raides depuis quelques années. Tout derniè rement nous pouvions assister à des mariages civils à grand orchestre, où des personnages de grande marque, — des académiciens s’il vous plait, — donnaient aux jeunes mariés leur bénédiction, tout comme l’eut fait l’archevêque ou le pape. Bientôt, vous le verrez, nous aurons le service funèbre civil en musique. Avant de porter le mort au cimetière ou au four crématoire, on aura une petite cérémonie laïque dans une salle de mairie. J’aime à penser qu’on n’oubliera pas les rafraîchissements, afin de donner aux assistants les for ces nécessaires pour accompagner le défunt jusqu'au bout. La chose serait cocasse, il faut en convenir, et je me permets de sou mettre mon idée aux amateurs d’in novations. Elle rencontrera peut-être du succès auprès d’eux. Mais, je le reconnais, elle est bien loin de valoir celle de M. le maire de Saint-Denis. Son institution du bap tême civil est tout simplement une inspiration géniale et je ne crois pas qu’on puisse trouver mieux. M. le maire de Saint-Denis est, comme on le sait, un parfait républi cain doublé d’un parfait socialiste * du moins il a cette prétention, et je ne veux pas la discuter, bien qu’elle soit fort discutable. Mais ce qui ne l’est pas du tout, par exemple, c’est la haine que ce magistrat professe pour les curés et pour tout ce qui se rat tache à la religion. Malgré cela, comme il n’est pas précisément un imbécile, ce munici pal s’est dit qu’il y avait de bonnes choses dans la religion et qu’il serait excellent de les assaisonner à la sauce laïque. Lorsque l’Eglise fait un chrétien, elle place le nouveau baptisé sous la protection d’un parrain et d’une mar raine destinés à remplacer le père et la mère, s’ils viennent à faire défaut à l’enfant. C’est là une coutume aussi pieuse qu’utile. M. le maire de Saint-Denis a pensé qu’il agirait en bon socialiste j en assurant le bénéfice du parrainage 1 aux jeunes gosses que les parents ont peur de voir nettoyer par l’eau 1 baptismale. Voilà pourquoi il avait...
À propos
Le Petit caporal était une feuille politique financé par le parti bonapartiste L'Appel au peuple et dirigée par François Perron. En 1877, choquées par la violence des propos de celui-ci, les autorités du parti confièrent la direction à un homme moins turbulent, Jules Amigues. Le journal, affichant pendant plusieurs décennies des tirages à quelque 20 000 exemplaires, fut publié jusqu'en 1923.
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