Extrait du journal
intrépide sans jactance et qui. rayonné de l'équilibre que son génie lui a créé. Ce jour est venu. Comme il a été cruel lement acheté 1 Je pense en ce moment au retour triomphal dans les foyers res tés intacts, au défilé des troupes — et surtout aux femmes infortunées, 'mères, épouses, filles, fiancées, qui, d'un regard cependant désabusé., chercheront encore sous les armes le héros disparu. Mais même celles-là, sous les longs voiles qui sont aussi les drapeaux de la victoire, puisqu'ils nous en rappellent le prix, même celles-là voudront s'associer à la joie commune. Ils ne sont pas tombés en vain lès fiers jeunes hommes I Par eux la patrie s'est agrandie à la mesure de l'univers et à cause d'eux elle est portée jusqu'au ciel par l'admiration du monde. Que Paris se dresse donc dans ses vêtements de fête, et avec lui'nos\grandes villes, nos lointains villages, nos hameaux, car ils, ont tous fourni à la joie de ce jour le funèbre tribut ! Paris deux fois violé en un siècle, que deux fois en quatre ans nous avons pré servé de la souillure, Paris qui a en fanté quatre révolutions libératrices, Paris qui a été le centre du monde et qui va le redevenir 1 II n'est de fête complète que celle qui s'extériorise et par où l'âme, longtemps captive, se di late avec les yeux. La France, Paris y ont droit après tant d'alarmes. Que sous le dôme mouvant des drapeaux, Paris se rende visite — et parmi ces drapeaux, :■ avec les étendards alliés qui rappellent le faisceau des héroïsmes, au-dessus, d'eux — nos amis nous le pardonneront — -le drapeau de Fleurus et de Valmy,. celui de la Marne et de Verdun, "celui des victoires dernières qu'on ne peut plus compter. Aucune fête cependant, aucune fête extérieure, aucune, ne peut valoir la fête intime que chaque être conscient doit porter en lui et éternellement. Elle éclate en nous sous la force du passé et du présent. Avoir été déchiré par l'ar rachement de l'Alsace-Lorraine ; avoir subi le talon du vainqueur ; avoir senti passer sur son front le souffle des in sultes étrangères ; o'être dit que la vie s'écoulait heure par heure, et que la jus tice ne venait pas, et "qu'elle ne vien drait pas ou qu'elle viendrait trop tard, comme une aurore sur un tombeau 1 Et puis, sans l'avoir ni voulu ni cherché, supporter cette longue guerre, revoir au foyer qui l'attendait cette partie de la patrie, recevoir en notre âme cette par celle errante de notre âme — qui a vu cela peut .mourir — et ce n'est pas de leur mort que nous devons plaindre nos êtifes chéris mais de n'avoir pas vécu assez pour cette joie. René VIVIANI....
À propos
Fondé en 1863 par Moïse Polydore Millaud, Le Petit Journal était un quotidien parisien républicain et conservateur parmi les plus populaires sous la troisième République. Le journal jouit vite d’un succès commercial sans précédent, renforcé par la publication de divers suppléments, parmi lesquels son célèbre « supplément du dimanche » ou encore Le Petit Journal illustré. La publication s’achève à l’orée de l’année 1944.
En savoir plus Données de classification - clemenceau
- erzberger
- hollande
- dantzig
- buca
- etranger
- weill
- wetterlé
- france
- paris
- allemagne
- alsace-lorraine
- russie
- marne
- chambre
- alsace
- verdun
- alliés
- mayence
- jeumont