Extrait du journal

/MERCREDI 17 AVRIL 1872 UNE VERTE VIEILLESSE Travailler, étudier, chercher, combiner, lutter, vivre en un mot; vivre pour les siens et pour soi; vivre avec l'espérance de se reposer un jour au milieu d'une famille aimante et attentive qui sollicitera vos avis et écoutera vos conseils c'est le rêve de tous les honnêtes gens. Un rêve que la Providence réalise bien On dirait que la nature parcimonieuse s'épuise auxfougueuxébatsdelajejnesse, aux combats journaliers de la maturité, et que la .sève vitale n'a plus la force de couronner de cheveux -blancs les têtes des vieillards, de conserver en eux l'ardeur de l'intelligence et- la, vivacité de .^l'esprit d'entretenir la vigueur du tempérament. Saluons donc respectueusement -les vieillards sur qui l'âge passe sans laisser de traces, qui gardent seulement des années écoulees l'expérience que donne" le souvenir et restent courageusement au poste du patriotisme et du devoir. Tel est le président de la République francaise, M. Adelphe Thiers, entré, depuis hier danssa soixante-seizième année. 1 Avoir été pendant cinquante ans l'infaisable pionnier de l'histoire, narrateur et acteur, écrivain et homme d'Etat avoir brisé un trône et édifié une dynastie; avoir tenu en échec un gouvernement tout entier et l'avoir obligé à mettre vainement en campagne toutes ses forces administratives et occultes; avoir prédit les désastres de la France sans pouvoir triompher des enthousiasmes optimistes sitôê- éteints; avoir parcouru l'Europe par un. hiver des plus rigoureux pour ne pas laisser la France absolument isolée: s'être condamné à la triste mission de conclure une paix lamentable....