Extrait du journal
DERRIÈRE ÉDITION L'AGRICULTURE J.-J. Rousseau disait que l'agriculture était le premier métier de l'homme. « C'est le plus honnête, s'écriait-il, le plus utile ét par consé- quent le plus noble qu il puisse exercer. » Il aurait pu ajouter que c était aussi le plus, difficile, ou du moins un des plus difficiles, car ie cultivateur a de terribles ennemis à combattre ; en première ligne : la Nature qui dispense la gelée, la neige, la pluie ou le so leil, sans se soucier de leurs effets. Nul n'osera nier que la culture des champs exige des connaissances spéciales, une atten tion constante, un esprit résolu, à la fois pru dent et audacieux. Si l'agriculture est dans le marasme, c'omme beaucoup l'affirment, la faute en est, en grande partie, aux vieux, errejjjents, à la façon dont beaucoup de cultivateurs dirigent la culture, à l'ignorance où ils sont des progrès réalisés. Il faudrait faire quitter à l'agriculture l'étroit sentier de laroutine pour la faire entrer dans une voie plus large et la mettre en état d'apprécier les bienfaits de la science, de les appliquer à la pratique. Il faudrait que le cultivateur apprenne à retirer: du sol tout ce qu'il peut produire ; actuellement la France n'est en Europe qu'au cinquième rang pour la production agricole, étant donné la densité de la population et le nombre des habitants nourris. La Belgique est au premier rang, l'Angleterre au second, l'Allemagne au troisième, l'Italie au quatrième. On compte en France 33,820,943 hectares re présentant une valeur approximative de 98 milliards de francs. Le revenu annuel étant actuellement évalué à environ 2,800 millions de francs, le rendement moyen net de la proÈrièté foncière en France n'est que de 2 85 0/0. lien ; d'autres constatations, aussi tristes, pourraient être faites. Un hectare de terre cultivé en céréales, par exemple, ne donne ici que 15hectolitres de blé; en Allemagne, il en donne 18 hectolitres. 4 Pourquoi cette infériorité en France "? Je le répète : parce que nous restons trop Mêles à la tradition, parce que nous ne rompons pas assez énergiquement avec la routine. Si le rendement du terrain n'est pas le même en France , que dans d'autres pays, la faute en est aux cultivateurs qui laissent leur champ s'appauvrir ou ne savent pas lui faire pro duire tout ce qu'il est capable de donner. Le cultivateur a une excuse : s'il ne pro duit pas autant, qu'il le devrait et" dans de bonnes conditions de revient, c'est qu'il ne sait pas. Oii l'aurait-il appris? De la bouche de son père. De sa propre expérience.» Mais, dans notre siècle, il ne s'agit pas de courir les sentiers battus; il faut en ouvrir d'autres; il faut suivre ceux que le progrès a nouvel lement indiqués, *** L'agriculture doit devenir moins routinière, Îilus scientifique; pour Cela il faut faire 'éducation du peuple, il faut le faire partiel per aux découvertes opérées par les savants, il faut lui apprendre ce qu'il ignore'encore. Au premier siècle de, notre ère vivait à Rome, où il était venu s'établir, un agronome, Columelle, qui a écrit un superbe - traité d'é conomie rurale. •Je vois partout, disait-il, des écoles ouvertes aux rhéteurs, à la danse, à la musique, même aux saltimbanques; les cuisiniers, les barbiers sont en vogue ; on tolère des établissements, où les jeux et tous les vices attirent la jeunesse im prudente ; tandis que pour l'art qui fertilise la terre, il n'y arien, ni maîtres, ni élèves, ni jus tice, ni protection. Voulez-vous bâtir? vous avé2 à chaque pas des architectes. Vouiez-vous courir les hasards de la merî vous trouvez partout des constructeurs, mais souhaitez-vous tirer parti de votre héritage, amé liorer les procédés qui vous semblent mal en tendus? vous ne rencontrez ni guides, ni gens qui .vous comprennent. ' Dix-huit cents ans se sont écoulés et les paroles de Columelle sont plus vraies que. ja mais : Il n'y a ni maîtres ni élèves ! Pour améliorer les procédés qui vous setnblent mal entendus, vous ne rencontrez pas de guides. On me répondra qu'il y a, depuis l'avène ment de là République, l'Institut national agronomique de Paris, trois écoles nationales d'agriculture,; celles de Grignon, de GrandJouan et de Montpellier et quelques écoles pratiques d'agriculture ; ces établissements rendent de grands services, mais des services restreints; quelques jeunes gens aisés, en petit nombre, les fréquentent;' la masse des culti vateurs ne reçoit aucune instruction agricole, fii ce n est quelquefois à l'école primaire où...
À propos
Fondé en 1863 par Moïse Polydore Millaud, Le Petit Journal était un quotidien parisien républicain et conservateur parmi les plus populaires sous la troisième République. Le journal jouit vite d’un succès commercial sans précédent, renforcé par la publication de divers suppléments, parmi lesquels son célèbre « supplément du dimanche » ou encore Le Petit Journal illustré. La publication s’achève à l’orée de l’année 1944.
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