Extrait du journal

pourraient-ils s'organiser? Vous me parlez des Etats-Unis du Nord. Ah! c’est toute autre chose. Les colonies anglai ses ont été entièrement peuplées de blancs, presbytériens insoumis, habitues à lire tous les dimanches les livres les plus républicains de la Bible , les imprécations des pro phètes et les gazettes de Londres, écrites par des commisvoyageurs du diable. Rien de pareil par ici. Le peuple sait qu’il est une bête de somme et que son sort ne chan gera pas. Quant à cette écume de l’Europe que nous en voie de temps en temps l’esprit de révolution dans ses malles, nous l’étoufferons avant peu, je vous en préviens, Xavier. — Nous l’étoufferons, ou bien il nous étouffera , mon seigneur. Ce sera l’un ou l’autre,et il y a plus de chances pour eux que pour nous. Si le vice-roi , qui était au Mexique l’image vivante de Ferdinand VU, était troublé à la vue des orages politiques dont le Nouveau-Monde commençait à être le théâtre , it n’en était pas de même des muletiers que nous avons vus tout à l’heure entrer en scène. Nés dans le peuple , tous étaient des hommes fortement constitués, bien formés pour l’exercice de la vie active, et menant , à travers une des plus belles vallées de l’Amérique, une existence tout à la fois énergique et douce. Associés aux contrebandiers et peut-être aussi aux voleurs de grande route, ils étaient chargés de transporter les bagages et les voyageurs d’une ville à une autre. Tout le long du chemin , ils fumaient, ilp buvaient, ils chantaient, et le terme du voyage arrivé, Us recevaient un assez gros salaire avec lequel ils faisaient bombance jusqu’à épuisement de finances , c’est-à-dire (tendant plusieurs jours entiers. Sous plus d’un rapport, eur vie ressemblait à celle des marins d’Europe qui, s’embarquant sur un navire pour une longue traite, rom pent la monotonie de la traversée par des orgies consom mées aux escales....