Extrait du journal

Gràco à l’aveu dépouillé d’artifices fait publiquement, l’autre jour, par un membre du conseil municipal.nous savons désormais quel est le vrai programme de la municipa lité actuelle, programme qu’on n’a pas affiché sur les murs, celui-là ; mais qui a remplacé peu à peu tous les autres, même le célèbre programme de Lyon. Ce pro gramme n’est, du reste, pas très compliqué ; il consiste purement et simplement à « embêter » le bourgeois, il n’est pas non plus très nouveau ; il a même déjà beau coup servi, mais les élus actuels estiment qu’il a encore du bon et s’efforcent de rappliquer à leur tour, dans la mesure de leurs moyens. Ainsi donc, on n’a plus guère qu’une préoccupation, à l’hôtel de ville, c'est de considérer Marseille comme renfermant deux catégories de citoyens, les citoyens que l’on embête et ceux qu’on n’embéte pas ou qu’on s’imagine ne pas embêter. Dans la première se trouve naturellement le bourgeois — on vient de nous l’appren dre une fois pour toutes, mais sans nous dire où commence et où finit le bourgeois. Une définition n’eùt pas été pourtant tout à lait inutile à ce sujet, car si nous jetons un coup d’œil sur rassemblée qui "siège à la mairie, nous sommes loin de n’y découvrir que des ouvriers proprement dits. Nous craignons" fort que là aussi ne se soit glissée la bête noire du farouche conseiller dont nous parlons. Il faudrait s’entendre. S’il suffit d’embéter le bour geois pour ne plus être bourgeois soi-même, c’est vraiment trop commode. Il nous sem ble bien que la première condition pour se livrer avec quelque efficacité à ce genre d’exercice , c’est d’appartenir au monde des travailleurs, des prolétaires et non au monde du patronat ou encore à celui des professions libérales. Et précisément nous voyons que le conseil actuel s’est recruté en grande par tie parmi les avocats, parmi les médecins, les industriels et même les rentiers, ce que nous sommes loin, du reste, (le blâmer. Mais, puisqu’on veut quand même porter ia question sur le terrain de classes, nous ne pensons pas que M. Flaissières et la plu part de ses collaborateurs aient toute l’au torité voulue pour embêter le bourgeois. Qu’ils aient toute la compétence désirable pour le tondre jusqu’au vif, nous n’irons pas jusqu’à le nier. Seulement, il faut croire que ce n’est pas par plaisir, mais par nécessité. A la rigueur, nous comprendrions que, s’il y avait à l’hôtel de ville trente-six ouvriers dans la franche acception du terme, ceux-ci eussent quelque velléité de < méca niser » le bourgeois, ne serait-ce que pour lui enlever tout prétexte de familiarité. Et encore ce n’est là qu’une hypothèse, car nous sommes convaincu qu’un conseil municipal comprenant de vrais ouvriers n’aurait pas de plus ferme désir que de vivre en bonne intelligence avec toute la popu lation. Mais, nous le répétons, il nous est difficile d’admettre que rassemblée qui fait l’ornement de notre cité soit, étant donnée sa composition,suffisamment préparée pour embêter le bourgeois. Nous avons peur, au contraire, que son inexpérience, à ce point de vue, ne lui joue un méchant tour et ne l’amène finalement à embêter tout le monde, hiénie ses meilleurs amis. Voilà le danger qu’il n’est pas mauvais de lui signaler. Le conseil actuel se trompe, en effet, s’il s’imagine n’embêter que le bourgeois, en privant Mai*seille de repré sentations lyriques. Il embête aussi une foule de travailleurs, de petits employés, qui aiment la musique ; de modestes et...