Extrait du journal

il s’étalt dit qu’une maison, où passent de gros revenus, va au diable sans maîtresse légitime. D’ailleurs il avait fait preuve d’un bon sens remàrquable dans le choix de la gardienne de son foyer. Elle était bonne, un peu laide, limitée dans ses aspirations, sans goût prononcé pour le monde. Co cou ple avait vécu heureux, c’est-à-dire sans disputes; vertueux, c’est-à-dire sans scan dales. Nul cri d’enfant n’avait jamais trou blé leur repos. Enfin la digue femme était morte juste au moment où, pour cause do maladie chronique; son existence allait devenir un embarras. Presque du Jour au lendemain,elle avait été remplacée — ose rait-on dire avec avantage ? — par une femme de charge respectable, do grand style, coulée sur le modèle de ces house keepers qu’on trouve dans les résidences quasi royales des pairs anglais. A soixante-cinq ans, Norbert Leroy con tinuait sa carrière de Sybarite avec l’or gueil légitime du succès.N’eût été la goutte, dont il souffrait parfois, il pouvait se vanter de n’avoir jamais souffert sérieusement, ni au physique ni au moral. Peu d’hommes auront connu aussi bien le Tout-Paris et ses histoires. C’était à se demander si quelque Diable Boiteux no venait pas, chaque matin, lui donner la liste des aventures des dernières vingtquatre heures. Lui-même, au surplus, avait la spécialité redoutable de se trouver, sans aucune préméditation, sur le chemin des gens qui avalent des raisons graves pour ne vouloir rencontrer personne. Pas besoin de dire qu’il vouait une pitié profonde aux pauvres hères de la génération actuelle, qui se lèvent de bonne heure pour faire du...