Extrait du journal
Les Français qui visiteront l’Exfiosition de Vincennes et s’émerveileront devant cette admirable syn thèse de nos colonies florissantes ne se rendront sans doute pas compte de ce que chacune d’elles a coûté à la France d’efforts, d’énergie, de persévérance. Afin de mieux juger des résultats obtenus il est bon de faire un retour en arrière et de com parer ce que nos possessions d’Afri que, d’Asie et d’Océanie étaient lors que le premier navigateur français les découvrit ou les occupa au nom du roi à.ce qu’elles sont devenues aujourd’hui.. L’histoire officielle est parfois su jette à caution. Pompeuse comme un discours de distribution de prix, elle îst trop portée à célébrer les exploits et les vertus des conquérants et des colonisateurs et ne nous rend pas toujours sensible la réalité infi niment plus intéressante et vivante que des récits académiques. C’est une bonne fortune lorsque l'on met la main sur des documents ayant échappé aux recherches des historiens et qui révèlent de savou reux « à-côté >» de la vie coloniale. M. Maurice Besson continue avec un rare bonheur de découvrir parmi les archives ou chez des particuliers ces « vieux papiers du temps des Isles » qui ont un parfum de vanilje, d’épice et de flibuste et donnent tant de ragoût aux faits et gestes des colo niaux de jadis. En lisant la seconde série qu’il nous présente ^aujourd’hui, nous comprenons mieux combien les héros sont frères des aventuriers et que, loin de répondre à l’idée convention nelle que nous nous faisons d’eux, d'ôtre coulés dans un beau moule en bronze destiné à l'ornement de la place publique de leur ville natale, ils furent, en réalité, des hommes soumis à toutes les faiblesses et que des scrupules de conscience n’embar rassaient pas toujours. C’est sans doute pour cela que le récit de leurs exploits nous amuse comme fis s’a musèrent eux-mêmes en courant des aventures pour le compte de la France et, souvent aussi, pour leur propre profit et agrément. L’an dernier, historiens et roman ciers nous ont longuement -,arlé de la prise d’Alger, premier acte dans un décor bariolé d’orientalisme et de turquerie de la difficile et dure conquête de l’Algérie. Personne avant M. Maurice Besson ne nous *\vait donné de piquants détails sur l’embarquement du dey Hussein quelques jours après que la kashah fut tombée entre nos mains. Jeanne d’Arc qui avait bouté les Anglais hors de France ne se doutait pas que son nom brillerait sur la régate chargée de bouter hors de son nid de corsaires le souverain déchu et son harem !... Ce ne fut point cnose facile que de faire monter à bord une centaine de femmes : épouse, filles, belles-filles, concubines, esclaves, sur un bateau de guerre. De nos jours les musulmanes algériennes mariées à de riches indigènes se rendent facilement en France, costumées à l'européenne ; à cette époque où les relations avec les Français n’avaient pas encore adouci la rigueur des mœurs orientales ce dut être pour ces malheureuses arrachées à la quiétude de leur palais une épreuve redoutable que de risquer d’être expo sées aux regards des hommes, sur tout, lorsque ces hommes étaient des vainqueurs. Ajoutons, des vain queurs assez chevaleresques puisque aucun d’entre eux ne réclamait sa part de butin; le temps n’était plus ou les Croisés entrant à Jérusalem se réservaient d’abord les belles Sarrasines avant de massacrer le reste de la population. De part et d’autre, la curiosité dut cire vive. Les officiers de la « Jeanne d’Arc » avaient l’imagination sur chauffée par l’arrivée de ce harem et plus d’une femme dut glisser par la fente du haïck un œil à la fois peu reux et avide vers les roumis détes tés. Mais l’attitude des officiers extrê mement correcte rassura Hussein Pacha. « Ce qui l’avait le plus inquiété lorsqu’il s’était senti à la discrétion de la France, nous dit M. Maurice Besson, c’était le sort de ses femmes et les contacts qu’elles pourraient subir à bord, aussi, au cours de l’entrevue qu’il eut avec le capitaine de corvette Lettré, ne manqua-t-il point de lui répéter que « son « honneur était entre ses mains. » Encombrant honneur 1 De retour à bord, le capitaine ordonna de prendre les dispositions suivantes : « On abandonna entière ment aux femmes la galerie de la frégate ainsi que la grande chambre et le commandant du bâtiment ne s’en réserva qu’une petite partie pour lui servir de chambre à coucher et de salle à manger. On établit une solide séparation consistant en une cloison de toile bien fermée, de chaque côté. Sur l’arrière de la batterie, on tendit de grands postes en toile contre la cloison de la chambre; celui de tri bord pouvait communiquer avec la grande chambre et la galerie par les portes qui sont de ce côté. » Malheu reusement, les officiers qui rêvaient de sultanes et de houris furent déçus: il était difficile de deviner de volup tueux corps de femmes dans les pa quets informes qu’ils virent passer rapidement ; leurs pieds nus'qu’elles ne pouvaient dissimuler trahirent, chez beaucoup, des mulâtresses et même des négresses. Devant ces peaux brunes et noires il n’était plus question de parler de teint aussi blanc que l'œuf de l’autruche ou la fleur de jasmin !... CLAIRE CHARLES-GENIAUX. {Lire la suite plus loin)....
À propos
Fondé en 1868 par Toussaint Samat, Lazare Peirron et Gustave Bourrageas, Le Petit Marseillais était le plus grand quotidien de Marseille, affichant un tirage de plus de 150 000 exemplaires en 1914. D'abord républicain radical, le journal s'avéra de plus en plus modéré au fil des ans. Dans un premier temps très local, il fut l’un des premiers journaux à publier dans la presse des récits de procès judiciaires sensationnels dès 1869, avant de s’ouvrir aux actualités internationales.
En savoir plus Données de classification - léon blum
- naegelen
- maglione
- locquin
- briand
- huillier
- dubourg
- paul-boncour
- bruche
- rémond
- france
- marseille
- augsbourg
- chicago
- paris
- japon
- oise
- allemagne
- bastia
- orly
- parti socialiste
- comité d'intérêts
- une république
- conseil général
- premiere
- popu laire
- agence havas