Extrait du journal

M. Chevreul atteindra aujourd'hui l'âge vénérable de cent deux ans. Les étudiants avaient l'intention de se rendre en corps, auprès du respecté doyen, et de renouveler, à l'occasion de son anniversaire, les témoignages sympathiques dont son centenaire donna le slgnal. L'état de faiblesse générale du vieillard ne lui permettra pas de se trouver au milieu de ses amis. Il doit garder la chambre. Les fatigues lui sont, d'ailleurs, interdites. On comprend qu'avec une longévité pareille, il faille user de ménagements. Quelques intimes seront donc seuls admis auprès du patriarche du Muséum. Les ovations et les marques de respect de la jeunesse des écoles en cette circonstance ont un caractère touchant et généreux qui va au cœur. Qui donc avait prétendu que dans notre jeunesse, trop vite frottée aux choses de la vie, trop complètement émancipée des préjugés anciens, le respect des vieillards avait complètement disparu? M. Chevreul est une protestation vivante contre cette calomnie. Ces égards et cette attitude de la jeunesse devant un homme chargé d'années, voilà un legs de cette éducation classique trop dénigrée, trop attaquée aujourd'hui. Nous avons tous sucé, avec ki moelle des grands auteurs grecs oa Ufes, le respect de la vieillesse. Tous les poètes anciens ont appris à honorer les vieillards. La législation était d'accord avec la poésie pour imprimer aux mœurs grecques et latines ce caractère de la vénération sénile. En honorant l'homme qui a passé un long temps sur la terre, ce n'est pas seulement un individu qu'on salue, c'est la vie, c'est l'humanité tout entière à laquelle on rend, hommage dans'là personne d'une de ses forces, d'un de ses rejetons les plus vigoureux. Ce sentiment est bon à conserver...