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Le Sémaphore de Marseille, 10 juin 1902

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Le Sémaphore de Marseille
10 juin 1902


Extrait du journal

Feuilletez n’importe quelle Constitution soit d'Europe, soit d’Amérique, de pays républicain ou de pays à chartes octroyées, vous ne trouverez, nulle part, cette idée que les arrêts, soit du suffrage universel, soit du suffrage restreint, ne doivent pas être respectés justement par ceux qui sont l'émanation de ces modes de suffrage. Dans aucun Etat, il n'est permis à ceux qui sortent d’une élection de frapper d’ostracisme ceux qui en sortent aussi. C’est une idée française et seulement française qu'une majorité s’arroge le droit de corriger à son profit les décisions électorales et de s’augmenter ellemême en rejetant,de son sein ceux qui ne pensent pas comme elle. Chez nous, c’est une mode de pratique courante que les vaincus doivent être complètement abaissés par les vainqueurs, sans tenir compte des manants. C’est un droit reconnu,au moins implicitement,et ce droit tous les partis l’ont exercé tour à tour. Cela est pourtant et il est incompréhensible qu’après trente-deux ans de République cette jurisprudence gothique existe encore. On en sait pourtant les inconvénients ; car, cette jurisprudence, on n'a jamais voulu quelle elle fut appliquée aux élections municipales. La loi de 1871 l’avait pourtant donnée aux Conseils généraux. Mais devant le sectarisme de quelquestures de ces assemblées, la vérification des pouvoirs,peu de temps après une expérience d’avance condamnée, fut réservée au Conseil diktat. Le Parlement est seul resté avec ce droit exorbitant de juger sans appel et de la dignité de scs membres et de l'ordre des opérations qui ont consacré le représentant du peuple. Et nous nous trouvons, à chaque renouvellement de la Chambre, dans un pays de large suffrage universel, base de notre Constitution, devant cette anomalie : l'opinion publique méprisée par ceux-là mêmes qui en viennent et après que cette opinion a été légalement consultée. Est-ce à dire que s’il y a eu des fraudes commises, des brigues condamnables, des manoeuvres délictueuses, elles ne doivent pas être jugées et réprimées ? Certainement que tous délits et crimes doivent être punis. Mais liJ ne peuvent que l’être par un tribunal, sur un jugement motivé, et c’est sur ce jugement qu’une élection devrait être cassée. C'est de la justice si simple qu’elle tombe sous les sens et s’impose comme un axiome. Comment n'esVil pas monstrueux que l'on tombe sous la volonté d'une majorité d'adversaires ! Mais alors c’est la loi du plus fort et la porte laissée ouverte aux brutalités d un coup d’Etat ! Nous savons bien qu'on peut répondre que les députés frappés ont droit d’appel et que les électeurs décident en dernier ressort. Mais ne songe-t-on pas que ces électeurs ne pourront plus agir que sous une sorte de pression et qu'en réalité une invalidation est toujours un procédé d’intimidation. On ne saurait donc trop protester contre des pratiques semblables. Il n’appartient à personne de corriger le suffrage universel. D a Heurs nul ne peut être juge dans sa propre cause, comme le cas se présente ici....
Le Sémaphore de Marseille (1827-1944)

À propos

Fondé en 1827 par les imprimeurs Joseph-François Feissat et Pierre Alexandre-Henri Demonchy, Le Sémaphore de Marseille est le plus ancien journal de Marseille et reçut notamment la contribution d’Émile Zola, qui en était le correspondant parisien. À l’origine généraliste, Le Sémaphore de Marseille se spécialise progressivement dans l’actualité maritime. Le quotidien disparait à la Libération.
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