Extrait du journal
1 II l'a montrée, cette démocratie, après de longues épreuvts, maîtresse enfin d'ellemême, assez éclairée désormais pour n'être plus un instrument docile entre les mains de ceux qui voudraient l'agiter. C'est elle qui remettra la France à son rang dans le monde par le travail, par les vertus, par la paix. Des applaudissémentsrépétés ont éclaté à cet endroit du discours. Tout le temps, du reste, que le président de la chambre a gardé la parole, l'auditoire, saisi et charmé, l'a interrompu de ses bravos. M. Gambetta a été rarement mieux inspiré. Voici une analyse de «e beau discours : Messieurs, a dit M, Gambetta, je ne saurais éprouver d'autre sentiment que celui de la reconnaissance. Je n'ai aucun mérite à assister à cette cérémonie. Je suis venu ici pour être au milieu,de vous, pour saluer cet anniversaire de cinquante ans, si rare dans nos institutions, pour m'associer à cette fête qui, pour tous les cœurs vraiment français, ne peut provoquer que des sentiments de solidarité et d'union. Cette .institution, dont vous êtes si justement fiers, messieurs, je crois qu'on peut la résumer en un motc'est la meilleure création qui ait été faite depuis.un demi-siècle poiir la cause de la justice. Au lendemain de la Révolution de 1830, la pensée des premiers combattants de Juillet fut de fonder une démocratie rationnelle, basée sur la science. Cette grande pensée de vait réapparaître avec le contingent de forces que lui apporta 1848, et, au lendemain de nos désastres, devenir plus féconde encore. Je n'ai qu'un regret, c'est de ne pas avoir plus tôt fait partie de votre association. (Applaudissements.) Cette association comporte un enseignement, c'est celui-ci : Des hommes, absolument indé pendants, en dehors du monde officiel, rien que par la force de là pensée," l'effort de l'intel ligence, ont réussi à grouper, réunir, utiliser les esprits les plus disparates, en prenant pour règle la vérité toute nue; chassant tout ce qui est rêve, fantaisie, caprice, chimère, rêverie, ils ont eu le respect de ceux à qui ils s'adressaient, et ils ne leur ont donné qu'un enseignement po sitif. Votre association aétéinspiréeparleplus grand penseur du siècle, le grand savant, le grand pa triote dont la vie a été uniquement vouée à dé barrasser la cervelle humaine des nuages de la métaphysique : j'ai nommé Auguste Comte. Elle a eu pour fondateur un autre savant, Perdonnet, qui, diffamé, fatigué, restait toujours souriant et étendait toujours le cercle de votre action. Je pourrais citer bien d'autres noms de cette pléiade célèbre ; je préfère vous dire le bien que vous avez fait et celui qui vous reste à faire. La politique est dans tout. Qu'est-ce que la politique? C'est la destinée de notre pays. Elle peut être la'mauvaise fortune, ou la réparation, selon la conduite des citoyens. Ah ! vous nous avez aidé plus que vous ne le pensez. C'est en vous isolant que vous avez fait acte de bonne politique. Votre action a été immense. Vous avez dit à tous les humbles, qui vivent de leurs mains, qui ont à peine reçu les premières no tions de l'instruction primaire : « Venez, nous avons là des maîtres dévoués, — hommes de sens et d'étude, — qui vous donneront le su perflu de leur temps, — ce qui est souvsnt le nécessaire de leur intérieur. Et ces humbles sont venus. De ce rapprochement il est sorti quatre cent mille ouvriers qui, tous, ont pu ac quérir lea véritables notions du progrès. Voilà, messieurs, la véritable communion, la communiom démocratique. Il est alors arrivé qu'avec lé goût de la science, les ouvriers ont demandé la démonstration de ' ce qu'on leur disait dans la politiqua. De là est sortie la démocratie républicaine, la réelie, celle qui ne s'inspire que du suffrage universel. J'ajouterai même que la seule démocratie est la démocratie française. A ceux qui nous disent que nous ne mar chons pas assez vite, je répondrai qu'on ne fait rien sans le temps; et qu'on ne peut tout changer en un jour et une nuit. La science, dont je vous parlais tout à l'heure, nous, apprend que ceux qui disent le contraire sont des so phistes et des trompeurs. Quand je rencontre ces derniers, je ne m'émeus pas, je fais comme le poète de Florence, je regarde et je passe....
À propos
Fondé en 1836 par Armand Dutacq, Le Siécle bouleversa la presse française grâce à une stratégie éditoriale révolutionnaire pour l'époque. Comme La Presse de Girardin, fondée la même année, ce quotidien fixa son prix d'abonnement à 40 francs – c'est-à-dire la moitié de celui des autres journaux – et entrepris de compenser cette somme modique par d'autres revenus, tirés de la publicité. Traditionellement anticlérical, il deviendra l'organe de la gauche républicaine pendant une grande majorité de la Troisième République.
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