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Le Siècle, 17 juin 1840

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Le Siècle
17 juin 1840


Extrait du journal

savons ce qu'il y eût de grandeur dans ces assemblées, et quoique des souvenirs de faiblesse et de'cruauté que notre conscience con damnera toujours" s'atfadient au nom de ces dernières, nous com prenons qu'on s'incline pourtant devant leur majesté terrible: mais nous vous répondrons d'abord que les hommes illustres à des titres divers qui.ont figuré dans ces assemblées ont été suscités, non par tel ou tel mode d'élection, mais par le grand mouvement de la révolution française.qui a jeté aussi à profusion les grands généraux dans nos aïaftées ; nous vous répondrons que le peuple alors s'était levé pour renverser, pour détruire, et que c'était là la première mission de ses répréséhtans, mission qui n'est plus à remplir aujourd'hui ; nous vous répondrons qu'elles ont tantôt exercé et tantôt subi la'dictature populaire, dictature redoutable, ■qui ne peut et ne doit-pas se maintenîr'dans des temps réguliers-, nous vous répondrons enfin que ni la Constituante, ni la Législati ve,.ni la Convention n'ont été élues d'après le système que vous avez adopté. Certes on ne reculait pas alors devant les réformes radicales ; bieH des malheurs et même des crimes sont venus de ce besoin ou de ce calcul qui portait les partis et les pouvoirs publics à flatter les masses : quand les piques des faubourgs envahissaient l'enceinte de la représentation nationale, sans prétendre juger d'un mot une grands époque à laquelle rien ne ressemble dans l'histoire, on peut dire que la France était en pleine démagogie: eh bien! même alors» on ne s'arrêta point à l'idée qui paraît si simple au jourd'hui, de conférer le suffrage direct à une masse de huit ou dix millions de citoyens ? L'assemblée constituante- était le produit du suffrage indirect, suivant les formes de l'ancienne monarchie. D'après les règles que posa la constitution de 1791, il y avait encore deux degrés d'éiection; dans ces assemblées primaires, les citoyens actifs, déjà privi légiés, puisqu'ils devaient remplir certaines conditions, payer l'im pôt et figurer sur le contrôle de la garde nationale, désignaient les électeurs qui seuls pouvaient choisir les membres du corps législa tif. Après les événemens du 10 août, l'assemblée législative, en convoquant une convention nationale, supprima toute distinction entre les citoyens actifs et non actifs, toute condition d'électorat et d'éligibilité ; elle appelait les citoyens à se réunir en assemblées primaires pour former les assemblées électorales. La convention elle-même, dans la constitution de l'an 2 ou du 24 juin 1793, maintint le sysième de l'élection à deux degrés. Oa le voit, le régi me que les radicaux recommandent comme l unique expression de la souveraineté nationale, fut jugé d'une application impossible, même par les assemblées de l'époque révolutionnaire. Est-ce donc que celles-ci étaient trop ombrageuses et craignaient de faire une trop large part à la démocratie ? On nous demande si nous avons peur, du peuple ou si nous le jugeons trop peu éclairé pour le charger de ses propres affaires. Nous ne craignons point le peuple, nous savons que ses instincts sont bons et généreux quand il est livré à lui-même-, mais nous souhaitons trop sincèrement son bien pour le tromper, et nous ne voulons pas qu'on l'abuse en l'excitant à la conquête de droits chi mériques que les masses ne réclament pas, doiîi. elles ne sauraient que faire, et qui ne seraient qu'un instrument de guerre pour les partis, tandis qu'on les présente au peuple comme un moyen inaillible d'arriver au terme de ses souffrances. Il n'est pas un des principes de la révolution auquel nous ne soyons fermement attachés. Le dogme de l'égalité, en ce sens que les intérêts de tous les citoyens seront protégés par la loi, et que le plus humble de tous pourra toujours, par son mérite, s'élever au premier rang, n'a point de défenseurs plus convaincus que nous. Mais nous n'ignorons pas combien de périls et d'extravagances peuvent naître d'une fausse interprétation de ce principe. Quand même nous n'aurions pas les souvenirs du passé pour nous en ins truire, l'espèce d'amertume avec laquelle ont été publiquement re...

À propos

Fondé en 1836 par Armand Dutacq, Le Siécle bouleversa la presse française grâce à une stratégie éditoriale révolutionnaire pour l'époque. Comme La Presse de Girardin, fondée la même année, ce quotidien fixa son prix d'abonnement à 40 francs – c'est-à-dire la moitié de celui des autres journaux – et entrepris de compenser cette somme modique par d'autres revenus, tirés de la publicité. Traditionellement anticlérical, il deviendra l'organe de la gauche républicaine pendant une grande majorité de la Troisième République.

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