Extrait du journal
non plus. Et n'osant plus interroger personne il erre au hasard. Serait-ce ici ? Et il ouvre une porte. C'est un vaste boudoir .avec des plantes rares, un piano, des canapés, de larges et profonds fau teuils en velours bleu. — Au salon des dames, à cette heure, s'écrie une voix qu'il reconnaît, celle du domestique de laooupée. Mais vous êtes fou, mon gars ! Allez donc chez vous. Puisqu'on vous dit que c'est à l'arrière, Et il repousse brutalement le pauvre voya geur, dont la fierté se révolte à la fin et qui demande le commissaire. — Ah ! vous voilà, monsieur, s'écrie celui-ci en le voyant! — Oui, mais j'ai besoin de vous pour trouver mon logement, — On ne yoi^s Va pas indiqué? Quel numéro avez-vous donc ? — Je n'ai aucun numéro. — Comment cela? Voyons votre billet... Des troisièmes ! Un émigrant ! Adressez-vous à l'arrière, dit le comptable en changeant de ton et en s'éloignant. Tout espoir est perdu; et, renonçant à cette cabine introuvable, le malheureux finit par se blottir entre deux caisses, dans un recoin obs cur du pont, où il s'endort à demi. Il est enfin cinq heures ! Tout est paré. Un mugissement qui, d'abord bas et grave comme celui d'un taureau, s'élève jusqu'à une noté aiguë et déchirante pour cesser tout à coup, remplit le silence du matin: c'est la sirène qui, de sa voix lamentable, lance ses. adieux à la terre. On repousse sur le quai les gens qui ne peuvent plus s'arracher aux embrassements de ceux qui vont partir, et les échelles tombent. Des femmes pleurent en bas, d'autres cou rent pour suivre le bateau, qui s'en va et qui leur arrache leur fils ou leur mari. Non, elles" ont eu tort de les laisser s'embarquer ainsi ! Et revenant trop tard sur une décision dont elles n'ont pas mesuré, toute la douleur, elles voudraient arrêter le monstre mugissant qui, lentement, s'éloigne indifférent à leurs san glots et à leurs larmes. On ne distingue déjà plus leur figure,mais elles courent tant que les dalles ne manquent...
À propos
Fondé en 1836 par Armand Dutacq, Le Siécle bouleversa la presse française grâce à une stratégie éditoriale révolutionnaire pour l'époque. Comme La Presse de Girardin, fondée la même année, ce quotidien fixa son prix d'abonnement à 40 francs – c'est-à-dire la moitié de celui des autres journaux – et entrepris de compenser cette somme modique par d'autres revenus, tirés de la publicité. Traditionellement anticlérical, il deviendra l'organe de la gauche républicaine pendant une grande majorité de la Troisième République.
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