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Le Soir, 29 juillet 1908

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Le Soir
29 juillet 1908


Extrait du journal

Qu'est-ce que le remords? On n'est pas fixé là-dessus, pas plus que sur la façon dont il sc manifeste. Ce doit être quelque chose dans le genre du radis noir, qui remonte aux uns, alors que les autres le digèrent aisément, sans renvoi. Donnons au remords la forme d’une boule, se promenant le long de la conscience, avec des tendances à se frayer une sortie . ce sont alors les aveux ; ils soulagent le cœur du criminel comme l'ipéca soulage l’estomac du poivrât. On prétend que les assassins adorent la publicité donnée à leurs forfaits. Le conseil. d'Avinain: « N’avouez jamais ! » est rarement suivi, parce que leur amour propre est flatté lorsqu'on les met en vedette et qu'on publie leurs portraits. Les brigands calabrais aussitôt après le crime courent à la recherche d'un brocard afin de sc confesser en toute hâte. La confession a un double avantage ; en premier lieu elle constitue une prime d'assurance contre les risques de l'enfer et donne une entrée de faveur en paradis, où le pécheur doit éprouver à lui tout seul, plus de jouissances que cent justes ; en second lieu," il a la garantie du secret, car l'intermédiaire à tonsure serait damné s'il mangeait le morceau. C'est tout profit. Le arât, en fin de compte, n'y perd rien, ni notre sainte mère l'Eglise, l'absolution leur valant toujours un fort joli cadeau, prélevé sur le butin. Sous le régime bourboulien, toutes les grandes routes du royaume des deux Sicilcs étaient infestées de bandits, et de moines aussi. Des quantités de croix se dressaient aux tournants ; ce n'était pas pour signaler les descentes dangereuses aux chauffeurs et aux cyclistes, mais pour indiquer qu'à cet endroit de paisibles voyageurs avaient été occis. Deux baliveaux croisés, une poignée de ciment et l'expiation était complète; on pouvait montrer à saint Pierre un casier judiciaire vierge, si l’on n’avait pas eu à intérêt à jouir du supplément de bonheur attribué au pécheur, au détriment de cent jutes, ainsi que je viens de le faire observer....
Le Soir (1869-1932)

À propos

Titre fondé en 1869 par le banquier Merton, la particularité du Soir est, comme son nom l’indique, de paraître après tous les autres journaux à partir de 19h30.  Ayant des sympathies impérialistes à l’origine, le journal se ralliera par la suite à la République tout en poursuivant sur une ligne politique conservatrice, oscillant entre le centre droit et le centre gauche. Le Soir reste un journal d’affaires défendant avant tout les intérêts financiers des différents groupes qui furent à sa tête. Le Soir cesse de paraître en 1932.

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