Extrait du journal

LE BUSTE DE SARCEY La Comédie-Française vient de refuser le buste de Sarcey que celui-ci lui avait légué dans son testament. M. Marconi, un jeune et savant ingénieur, a inventé, on le sait, la télégraphie optique, ou plutôt la télégraphie sans fil. J'ai fait assister quelques amis à de nouvelles expériences en core plus étounantes : la téléphonie sans fil. Comme j'ai pris un brevet pour cette invention, je ne crains pas qu'un autre vienne exploiter ce système dont je vais en deux mots exposer le fonctionnement : Pour téléphoner sans fil, vous installez d’abord un jeu de sonneries des tinées à appeler la personne à qui vous voulez parler; quand elle a répondu à l'appel électri que, vous lui parlez très haut, le plus haut pos sible, et môme encore plus haut si elle est sourde. Ma première expérience a eu lieu hier avec un plein succès. Il s'agissait de demander à Sarcey ce qu'il pense du refus de la ComédieFrançaise d'accepter son buste. Je n’at qu'à rela ter simplement cette interview : — Allô I Allô '.{sonnerie électrique).—Mademoi selle, voulez-vous me donner le 00. — Vous dites bien : le double zéro ? Monsieur se croit en communication avec un café : nous n'avons pas de kummel au bureau central des téléphones. — Voyons, mademoiselle, vous savez bien que le n* 00 est celui de l'entrée des Enfers. Vous u avez donc pas appris la mythologie grecque ? La téléphoniste cherche son annuaire et finit par trouver le numéro en question. Elle me donne la communication. Saint Pierre qui se trouvait au téléphone me répond : — Allô ! Allô ! Que désirez-vous, monsieur? — M. Sarcey est-il là ? Je voudrais lui parler. — Parfaitement, je vais le faire prévenir. No quittez pas l'appareil. Quelques minutes se passent. Comme je suis habitue aux lenteurs téléphoniques, je ne m'im patiente pas. Trois minutes après, M. Sarcey est venu au téléphone et le dialogue suivant s'engageait entre lui et moi : — C'est vous, mon cher maître? — Parfaitement. Et comment va? —- Pas trop mal. Au moins ici on est au large ; c'est vraiment plus confortable que dans ces maudits fauteuils de théâtre, où le contenant, pendant toute majvie, a été toujours plus petit que le contenu. * — Mais où êtes-vous donc ? — Dans les couloirs, mon cher ami. Il faut vous dire que la feuille de location était pleine ; on ne m’attendait pas encore, et je me de mande où je vais me loger. Au Paradis, il mo semble que cela va être plein de gens sérieux. Je crois que ce sera plus amusant du côté de l’Enfer : il y a là au moins du monde rigolo. Vous savez que j’ai toujours aimé le vaudeville et ceux qui en faisaient. Et puis, il y a une lé...