Extrait du journal

qoe, quelle que soit la composition définitive du- Reichstag, la loi militaire sera votée, car, sauf les socialistes, tous les partis redoutent une seconde dissolution. UN JURÉ TRÈS MALIN Un négociant de Paris dont le nom est sorti de l’urne, et qui devait siéger en qualité de juré dans la seconde ses sion de juin des assises de la Seine, s’en est tiré d’une façon qui, selon toute pro babilité, trouvera des imitateurs, dési reux de se soustraire à une servitude qui les gène. Car, en y regardant de près, les refus de serment et autres défaites de la même farine sont bien plutôt des farces que des raisons. Le négociant en question a trouvé autre chose. Tout d’a bord, il a bien invoqué le refus de ser ment, sous prétexte qu’il ne croit pas en Dieu ; ensuite, il a déclaré être très mal disposé pour juger une affaire, attendu que la société ne faisant pas tout ce qu'elle doit faire pour prévenir les cri mes, elle n'a pas le droit de punir les cri minels. Cela veut dire que la justice cri minelle est inutile, et qu’elle dépasse les bornes des choses permises en arrachant des négociants à leurs affaires, pour leur offrir un siègo dans le jury. Ce négociant est adorable, et je me de mande ce qu’il ferait si, par hasard, il trouvait son caissier en faute, ou s’il pre nait un quelconque do ses employés la main dans le coffre-fort. Ces délits-là sont inscrits dans le code et soumis à des peines variables, jusqu’à nouvel ordre, c’est-àdire jusqu’au jour où, grâce aux théories du négociant, ce sera le tour des honnê tes gens d’être traduits en justice. Par conséquent, en dépit de ses théories bi zarres, il n’est pas facile de croire que le fleuriste de la rue de Cléry, c’est la spé cialité du négociant, laisserait s’en aller les délinquants, mais, bien au contraire, qu’il les remettrait au plus vite entre les mains du commissaire, chargé de les con duire en lieu sûr. Et cependant, rien n’est plus contraire à ses théories, puisque, d’après celles-ci, la société n’a pas le droit de punir. Il n’est pas très difficile de savoir jus qu’où pourrait aller l’application d’une pareille doctrine, et ici nous n’en sommes encore qu’au vol. En cas d’assassinat, d’incendie volontaire, de tout ce qu’il est possible d’imaginer do plus horrible, ce sera la même chose. La société a-t-elle fait tout ce qu’il est possible de faire pour prévenir le crime? Non! répondra l’aimable juré. Donc, pas do compétence en fait de justice répressive l C’est elle qui est la seule coupable, et qui devrait être tout entière au banc dos accusés. Quel dommage, pour les filous à la piste d’un porte-monnaie, de ne pas faire la rencontre d’un tel homme, à l’heure où le coq ne chante plus ! Ils opéreraient le plus tranquillement du monde, et si, par hasard, les sergents de ville accouraient, pour le tirer de peine, au moment même du dépouillement : « Non, non, dirait-il, je vous en prie, voyez ailleurs. Assuré ment, ces messieurs 11e sont pas la fleur des pois ; mais ils sont ce que la société les a faits, et elle n’a pas le droit do les punir 1 » Voilà ce que devrait faire le citoyen en question; mais il y a gros à parier que, ayant un revolver en poche, il s’en servirait au mieux de ses intérêts et en verrait tranquillement dans l’autre monde un ou deux de ses agresseurs. Les beaux phraseurs en sont tous là, logés à la mémo enseigne, et jouant, au petit pied, les philosophes criminalistes dont ils ignorent même les noms, et qui d’ailleurs ne se gêneraient pas pour casser la tète de l’individu qui mettrait la main dans leurs poches ou dans leurs tiroirs. Pour...