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Le Temps, 1 octobre 1878

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Le Temps
1 octobre 1878


Extrait du journal

du travail s’accrut tellement que l’on put donner, dès la fin de la première année, des parts mini mum de 450 francs. La moyenne totale des salai res» ordinaires annuels d’un peintre, à Paris, s'é levant à environ 1,050 fr., c’était un supplément de'près de moitié. . , ,. : La chose date de 1842. Satisfait de cette expé rience, M. Leclaire, avant de mourir, voulut aller plus loin et assurer la durée de l’institution. En 1869, après avoir consulté ses ouvriers, au moyen d’un questionnaire, il organisa son entre prise par un nouvel acte social notarié, destiné à y. associer plus étroitement encore les ouvriers. Voici les dispositions principales de cet acté, con firmé par des contrats postérieurs : Parmi les ouvriers, il est formé une élite ou noyau d’hommes, âgés de plus de vingt-cinq ans et de moins de quarante, qui se distinguent par leur capacité et leur moralité. Ceux-là peuvent ob tenir un supplément de salaire de 25 c. par jour, qui est payé à la fin de l'année. Après un travail non interrompu de cinq ans, ils peuvent deman der à entrer dans la Société de secours mutuels: une fois admis, ils perdent le supplément de sa laire, pour jouir d’avantages bien plus considéra bles. - Cette Société, en effet, propriétaire d’un capital en argent de 200,000 francs, formé de bénéfices accumulés, et qui porte intérêt, joue le rôle de commanditaire de l’entreprise ; elle reçoit 25 Q/è des bénéfices net, en outre du produit du droit d’entrée (20 fr.), des gratifications des clients et des amendes. Elle sert des pensions viagères de 1,000 fr. à ses membres, à partir de cinquante ans, ou bien en cas de blessures et d’accidents. Elle paye aussi des secours ou même des pensions à d’autres ouvriers, qui ont contracté, au service de la maison, des infirmités graves. . La moitié du bénéfice, soit 50 0/0, est distri buée individuellement à chaque ouvrier, en pro- ; portion du travail et du traitement de l’année, sans acception de catégories. Ainsi, en 1877, il y a eu 984 ouvriers participants. Le salaire ne subit pour cela aucune retenue. .Un comité de, conciliation, composé de cinq ou vriers, trois employés, et du patron, président, de droit, est nommé au scrutin secret par l’assemblée du Noyau pour régler les difficultés intérieures et faire observer la discipline. Il y a toujours deux associés en nom collectif, tenus d’apporter chacun 100,000 francs. En cas de décès de l’un, le Noyau élit son successeur, qui assume aussitôt tous les pouvoirs et la responsa bilité qui résulte del’aci e social. Chose à noter, le nouveau chef réalise peu à peu son apport d’associé au moyen de la part de bénéfices (12 1/2 0/0) qui lui revient chaque an née et de son traitement de 6,000 francs. Doux fois déjà, depuis la mort du fondateur, rassem blée a exercé son droit d’élection. L’avoir de la Société de prévoyance dépasse en ce moment un million de francs, placé partie dans la commandite susdite, partie en rentes sur l’Etat et à la caisse des retraites de la vieillesse. La répartition des bénéfices pour 1876 a permis de distribuer plus de 112,000 francs entre 1,081 ouvriers, y compris des ouvriers temporaires. Ou s’explique, en lisant ces chiffres, le mot d’un des part-prenants : « Si dans cette maison on tra vaille beaucoup, c’est un vrai plaisir ; cela rap porte quelque chose au bout de l’année. » Un tel exemple n’est-il pas fait pout être mé dité? On admirera sans doute les sentiments à la fois sensés et généreux de l’initiateur, simple ou vrier lui-même, qui, en arrivant à la fortune, se souvint de son humble origine et de ses pénibles débuts. Mais n’est-il pas frappant de retrouver dans cette organisation industrielle, sortie de la tête d’un modeste entrepreneur éclairé par l’ex périence, le mélange de privilèges et d’égalité de droits, la composition aristocratique du pouvoir électif et disciplinaire, les garanties d’indépen dance pour la direction, enfin les précautions et les contre-poids que les législateurs de métier ont introduits dans certaines constitutions démocrati ques pour les rendre stables. On remarquera aussi que l’œuvre a été engagée et conduite durant une vingtaine d’années par un seul homme, maître de ses résolutions, conduisant à son gré l’expérience, composant avec soin une élite dirigeante, et dis tribuant lui-même, à titre de gratifications, les 2/5 des 500/0 de bénéfices qu’il avait réservés à ses ouvriers. Que conclure de tout cela ? C’est qu’en un tel ordre de choses la générosité, l’équité même ne suffisent pas à assurer le succès : il y faut une forte direction avec beaucoup de tact, de sens pratique, nous dirions volontiers de sens politique. Nous nous bornons à mentionner une autre mai son qui, dans une mesure plus restreinte et selon des données toutes différentes, a aussi institué la participation aux bénéfices : c’est celle de M.* Ghaix. Elle distribue chaque année 5 0/0 des bé néfices aux ayants droit, employés au moins de puis trois ans; une deuxième part de 5 0/0 est destinée à leur constituer un fonds de prévoyance et de retraite ; une troisième, attachée à la pré sence du participant dans la maison, ne lui est ac quise qu’à soixante ans ou après vingt ans d’assi-...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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