Extrait du journal

son parti. Le pire qu’il en puisse résulter, c’est que les gens qui n’ont pas de goût pour le tapage se tiennent à l’écart des réunions publi ques. Ce qui, à notre sens, est plus grave, c’est de voir le débat électoral dégénérer en une de ces batailles de bas étage où ies imputations diffa matoires s’échangent entre les adversaires et où ceux-ci cherchent mutuellement à se traîner dans la boue. Que les électeurs s’inquiètent de l’honorabilité du candidat qui sollicite leurs suffrages, rien de plus naturel ; mais il y a loin de cette préoccupation légitime à cette pra tique qui consiste à pénétrer dans les détails les plus intimes de la vio privée, à aller scruter les affaires de famille, à recueillir tous les plus misérables bavardages, toutes les calomnies les plus grossières pour s’en faire un argument contre un adversaire politique. Où irons-nous avec ce système, et comme nous aurons bien relevé la France aux yeux des peuples qui nous regardent, lorsqu’on aura donné à entendre que tel ou tel candidat, qui peut être demain un député, est le dernier des hommes. Ces réflexions nous sont inspirées par ce qui s’est passé au cours de la période électorale dans certaines réunions publiques, et notam ment dans la réunion tenue hier soir dans le 20e arrondissement, à la salle Graffard. Dans cette réunion, présidée par M. Clémenceau, la politique n’a tenu qu’une place plus que secon daire. Toute la séance a été prise par un débat digne de la cour d’assises. Le candidat a dû se défendre contre des accusations ayant trait à sa vie privée et d’un caractère excessivement grave. Il serait très fâcheux de voir se généraliser des pratiques semblables; aussi faut-il réagir éner giquement contre cette tendance, qui semble s’accroître depuis quelques années, à substituer aux discussions politiques les discussions pure ment personnelles, et à transformer chaque homme qui occupe une place quelconque sur la scène politique en une sorte de malfaiteur à l’égard duquel on peut se permettre toutes les imputations, tous les outrages, toutes les ca lomnies. La vie politique, dans ces conditions, ne serait plus tenable. Tous les gens qui ont le sentiment de leur dignité s’en écarteraient, et nous ne savons pas ce que pourrait y gagner la France. —— -3^ ÉTAT ACTUEL DE L’ALGÉRIE...