PRÉCÉDENT

Le Temps, 5 avril 1884

SUIVANT

URL invalide

Le Temps
5 avril 1884


Extrait du journal

dèles} et multiplier, si l’on peut dire, les incon vénients; les périls, du système par le chiffre formidablement accru des jeunes gens qui cher-. cheront à se faire ajourner ; il faut établir ce cal cul pour se rendre compte du caractère vrai de la loi nouvelle. Sans. incriminer le moins du monde les. futurs conseils de révision, n’est-il pas permis de penser qu’un jeune homme qui aura des relations utiles, qui tiendra de près ou de loin à quelque électeur particulièrement in fluent, aura bien de la malchance s’il ne réussit à se faire ajourner et finalement à échapper au service? Ainsi, on supprime le volontariat, on. veut biffer de la loi les dispenses conditionnelles des membres de l’enseignement, on se prépareà porter une atteinte peut -être mortelle au génie de ce pays, le tout pour que l’égalité cesse d’être un vain mot, entre dans, les faits, et on aboutit, en somme, à quoi? A un système qui contraint à réformer ou à ajourner 20,000, 30,000 ou 40,000 hommes, dont beaucoup à coup sûr seront rangés par la faveur dans des catégo-. ries élastiques, où tout candidat bien appuyé peut se flatter d’entrer. On fait la guerre au pri vilège, ou, pour mieux dire, à ce qu’on appelle; le privilège des professions libérales, de l’art et de la science, et on crée au profit de l’intrigue un privilège véritable cette fois, qu’aucun grand intérêt social ne compense et que .la morale la plus élémentaire condamne. Voila l'égalité telle que la comprend la commission de l’armée. Veùt-on un autre exemple des conséquences où mène l’égalité entendue d’une certaine ma} niére? Nous l’empruntons à l’amendement de M. Ténot, amendement inspiré -par un esprit deconciliation auquel nous rendonsd’Mlteûïskom-' mage. Les élèves sous-officiers entrés dans des! écoles spéciales, après un an de service comme soldats, seront libérés, par décret, à la suite d’épreuves déterminées et dans des délais va-.' riables. Dès le premier jour, nous faisions remarquer ce qu’a dé choquant cette libération qui n’est pas réglée par la loi, qui est abandon née au bon plaisir administratif et ministériel. Qui ne voit que, là encore, la porte est lar gement ouverte aux influences et aux abus? A-la sortie comme à l’entrée de la caserne, l’arbitraire ou la faveur, c’est-à-dire le privilège sous sa forme la plus odieuse, c’est-à-dire la né gation de l’égalité. Tel est le point de départ et le point d’arrivée du projet de loi, même amendé dans le sens libéral qu’indique M. Ténot. Et nous, nous qui proposons un allègement de charges militaires pour les licenciés en droit, pour les ingénieurs, pour les médecins, pour les instituteurs, une dispense pour les membres de l’enseignement secondaire et de l’enseignement supérieur, toutes catégories où l’on n’entre point par la brigue, toutes professions nécessaires et qui se réclament de l’intérêt supérieur du pays, on nous traite d’adversaires et de contempteurs de l’égalité ! . ‘ Au fond, tonte la différence entre nous et nos contradicteurs se ramène à ceci : l’égalité abso lue étant impraticable, les considérations finan cières à elles seules s’opposant, invinciblement à ce qu’on la réalise, nous reconnaissons un fait qu’ils'S’efforcent de dissimuler. Eu outre, nous cherchons à faire profiter l’art, la science, la haute culture de l’esprit, sous ses diverses for mes}'-de ces dérogations, d’ailleurs inévitables, au principe de l’égalité. Nos contradicteurs, lors qu’on les pousse un peu, consentent à ce qu’il y ait des favorisés, sinon des privilégiés, et ils ne peuvent pas ne pas y consentir, la force des choses les y contraint ; mais ils redoutent , par dessus tout que la faveur profite à ceux-là seuls qui en sont dignes. — :— « On n’a pas oublié les tergiversations peut-être sans exemple par lesquelles la Chambre, sa commission et le gouvernement ont pas sé avant de s’arrêter au projet qui a été finalement transmis au Sénat ; le gouverne ment avait bien jadis mis en avant le sys tème des grandes sections, mais il avait renon cé à le défendre positivement et s’était quasi rallié, en. dernier lieu, au scrutin d’arrondisse ment, qui à ce moment semblait réunir les sym pathies de la majorité; le lendemaiu le vent avait tourné, et .le grand sectionnement s’est trouvé.tout à coup, on ne sait pourquoi, l’objet des faveurs de bon nombre de députés qui n’au raient pas voulu en entendre parler la veille. C’est dans ces conditions plus qu’iusolites que la loi a accompli seule et sans escorte le trajet du Palais-Bourbon au Luxembourg. Les contradictions et les incertitudes de ,1a Chambre, les hésitations et en fin de compte le détachement du cabinetdonnaient au Sénat une li berté d’appréciation et de décision absolue dans pette affaire. Il lui a paru que, de toutes les so lutions accueilliës- dans l’autre Assemblée et entre lesquelles les circonstances lui laissaient le choix, la nomination au scrutin de liste des quatre conseillers que l’arrondissement nomme au scrutin uninominal était encore la plus sou tenable et la moins -chanceuse. Il a su que, de puis le vote, beaucoup de députés -avaient réflé chi à l’aventure que le grand sectionnement nous faisait courir; il s’est demandé, avec eux, s’il était bien prudent de placer à côté ou plus...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

En savoir plus
Données de classification
  • margaine
  • labiche
  • gambetta
  • ténot
  • depretis
  • gratry
  • khar
  • de gossler
  • lagrange
  • de goltz
  • gordon
  • allemagne
  • paris
  • berlin
  • autriche
  • ger
  • londres
  • egypte
  • wiesbaden
  • stradella
  • sénat
  • chambre des communes
  • atr
  • heidelberg
  • la république
  • assemblée nationale
  • autre assemblée
  • union postale
  • sacré-collège
  • parlement