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Le Temps, 5 juin 1889

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Le Temps
5 juin 1889


Extrait du journal

LE RECRUTEMENT RÉGIONAL La Chambre-est de nouveau saisie de la loi sur l’armée, que le Sénat vient de lui renvoyer. La commission qu’elle a chargée de l’examiner se réunit demain pour statuer sur les modifi cations que le texte voté au palais Bourbon a subies au Luxembourg : elles portent essentiel lement, on le sait, sur les dispenses de droit et sur le mode de recrutement que la Chambre voulait rendre régional et que le Sénat préfère maintenir national. Cette seconde question a donné lieu, de la part de la haute assemblée, à une discussion approfondie où tous les argu ments pour et contre ont été produits et d’où est finalement sortie une majorité énorme en faveur du système actuel. On ne sau rait donc espérer une transaction de ce côté et, à dire le vrai, on n’en peut demander sérieusement aucune à des hommes qui se sont placés au point de vue de la force de l’armée et de la sécurité du pays, et dont beau coup ont dans la matière une compétence in discutable. Les arguments qui les ont décidés sont d’ailleurs d’une réfutation difficile. La grande raison qu’ont donnée leurs adversaires, c’est qu’en réalité, depuis quelques années, la réforme est appliquée contrairement d’ailleurs à la loi organique. M. le ministre de la guerre a déclaré, en effet, au Sénat qu’à force de trans gresser les règles tracées par la loi de recrute ment de 1872, nous en sommes arrivés petit à petit à substituer au recrutement national un véritable recrutement régional. Toutes les ar mes spéciales sont intégralement soumises de puis plusieurs années à ce dernier mode, et 75 0/0 des effectifs de l’infanterie sous les dra peaux sont tirés des contingents de la subdivi sion de région la plus voisine de celle occupée par le régiment actif. Ainsi, les recrues ne ser vent plus qu’exceptionnellement au dehors de la région dont elles sont ori^rîmiircs. y En môme temps qu’on transgressait les dis positions de la loi de 1872 sur le recrutement national, on rompait aussi avec le vieil usage —t- ayant bien ses avantages. — des change ments périodiques de garnison. Sauf à Paris et à Lyon, la stabilité des régiments est devenue complète. Cette modification radicale apportée à l’existence des officiers, en dehors de toute prévision, a porté ses fruits. Au mécontente ment a succédé la résignation, puis sont inter venues les solutions nécessitées par un nou veau genre de vie. Les changements fréquents de garnison étant le seul obstacle sérieux à la vie de famille, l’officier s’est marié dès qu’il a été immobilisé dans sa garnison. Autrefois, dans les corps de troupes et dans l’infanterie surtout, le mariage était une exception. Au jourd’hui, il est devenu assez fréquent pour laisser supposer qu’un jour prochain il sera la règle. . Cette transformation des mœurs de nos ca dres n’a été jusqu’ici envisagée qu’au point de vue moral et des relations entre civils et mili taires. On s’est naturellement félicité des ré sultats, on s’est félicité surtout d’avoir à con stater que, grâce aux alliances plus nombreu ses, aux relations plus intimes avec la popula tion civile les idées nouvelles pénétraient dans les corps d’officiers et les rattachaient plus étroitement au gouvernement de la République. Il y à cependant un revers à cette médaille. Pal* le fait de leur immobilisation dans leurs garnisons, les officiers se sont alliés et s’allient le plus souvent à des familles de la région dans laquelle ils sont à demeure fixe, S’ils ne se ma rient point, ils nouent des relations d’amitié, d’intimité avec la population. Il en résulte for cément qu’ils y perdent de leur indépendance. Il est si difficile de refuser à sa famille ou à ses...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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