Extrait du journal

petits : artifices de procédure, révolte de la dé fense qui, à tort ou à.raison, se prétend jugulée et obtient ainsi un double bénéfice: celui de faire vibrer une corde très sensible dans tous les cœurs et celui d’ajouter des délais aux délais déjà écoulés. Oç, chaque jour qui passe est au tant de gagné pour le travail de démoralisation générale qui se poursuit dans le public. . Qui. donc, peut .se flatter d’échapper à la con tagion de ce mal? Le magistrat instructeur luimême, s’il faut en croire les « instantanés » pu bliés sur son compte le jour même où les dé bats doivent s’ouvrir, opinerait que l’accusé est un « dévoyé, très intelligent... qu’il n’est pas un alcoolique, ni un forcené... »' et conclurait phi losophiquement: « Ce qui lui fait le plus de tort, ce sont ses antécédents et ses condamnations de droit commun ». Là-dessus, quand l’affaire est remise, on peut imaginer sans peine le soula gement des jurés, lesquels n’aspirent sans doute qu’à laisser à leurs successeur^ d’une autre session l’honneur et le péril du verdict. Ainsi vont les choses, du besoin de lyncher, qui se manifeste tout d’abord, aux velléités d’ab soudre, qui finissent par s’insinuer dans les cœurs. A aucun moment, la société ne paraît avoir le sentiment ferme et mesuré de son droit, de ce droit qu’il s’agit puissamment d’affirmer, de maintenir et, si l’on peut dire, de légitimer par l’usage qu’on en fait. Par malheur, un cercle vicieux se forme qui nous enserre. L’anarchie est d’autant plus redoutable qu’elle se produit dans une société où prévalent des dispositions pareilles. La société ne pourra se considérer comme étant à l’abri du danger que le jour où elle se sera vigoureusement ressai sie et où elle aura retrouvé l’assiette morale dont le défaut se fait si cruellement sentir....