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Le Temps, 6 janvier 1896

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Le Temps
6 janvier 1896


Extrait du journal

pour passer outre, d’un grand élan de cœur. Elle attend le fameux cri de l’amiral dans Mon sieur Alphonse. — Relève-toi, créature de Dieu ! Elle guette donc avec angoisse sur le visage et dans la contenance du jeune homme l’effet de son aveu. Et lui... mon Dieu ! ce n’est pas un mufle ; mais ce n’est pas non plus un saint, ni un héros. C’est un homme et un homme qui aime; mettez-vous à sa place? Il a une défail lance ; il s’appuie à la table, pâle, oppressé. Il balbutie des excuses; ce qu’il fera, il n’en sait rien. Il a été assommé du coup; il faut qu’il ait le temps de reprendre ses esprits et il s’en va, sans avoir donné de réponse ferme. Ça, c’est déjà de bon théâtre; mais nous en allons avoir d’excellent : une scène tout à fait supérieure. . A l’acte suivant, les Mazaron sont allés au bal de l’Hôtel de Ville ; ils ont voulu y emmener Germaine, qui a refusé avec une obstination farouche. Elle veut rester seule en proie à ses réflexions. Les parents ne sont pas plus tôt sor tis que Henri entre. Il a beaucoup réfléchi ; il s’est ravisé. H a senti que chez lui l’amour était plus fort que le préjugé mondain et que mieux valait s’y aban donner. H vientdire à Germaine qu’il passe con damnation sur la faute commise, qu’il pardon ne, qu’il épouse et donne un père à l’enfant. Mais Germaine a réfléchi de son côté. Elle com prend bien que pardonner, ce n’est pas oublier; que celui qui pardonne a toujours barres sur la personne à qui il a pardonné ; qu’un jour, le premier amour s’étant amorti ou ayant disparu, le spectre de la faute se dressera vivant entre eux deux et empoisonnera leur bonheur. Le pardon, non, cela ne suffit pas; ce qu’il faudrait, ce serait une élévation de sentiments, une cha rité d’amour si parfaite que toute trace du passé fût abolie dans l’esprit du mari. — Eh bien, c’est cela, crie le jeune homme, emporté un instant vers les sublimités idéales. — Non,, ça n’est pas cela, reprend tristement Germaine. Vous pardonnez, et c’est tout ; vous ne pouvez pas plus ; je ne vous demande rien de plus. Et s’arrachant de ses bras, car Henri, dans un grand transport d’amour, l’a saisie et a posé ses lèvres sur les siennes, elle lui rend sa parole et le congédie. Il s’en1 va, et nous ignorons si, au fond, bien au fond, dans ce coin sombre de la conscience où l'on n’aime pas à pénétrer, il n’est pas content et de sa grandeur d’âme et du peu de succès qu’elle a obtenu. Mais ce mystère même nous charme ici ; car il ouvre à notre imagination des profondeurs où nous pouvons nous enfoncer à plaisir. Germaine, restée seule, se livre... j’allais dire :...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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