Extrait du journal

A Monsieur le docteur Maurice Pradel, hôtel de Noailles, Marseille. Saint-Leu-Taverny, le 20 septembre 188*. « Mon cher enfant, » J’ai à te parler de bien tristes choses. Ton camarade et ami, le capitaine Henri Lassagne, est mort, hier matin ; il s’est tué, par accident, en déchargeant ses pistolets. Du moins, tel est le rapport de son ordonnance, qui se trouvait seul auprès de lui dans son appartement de garçon à Paris. J’étais à la villa Diane, au chevet de notre -chère Yseult, lorsqu’un message éperdu est venu m’appeler auprès de la malheureuse mère. Elle et la pauvre Berthe font pitié. Et il y aurait de la cruauté à vouloir consoler de pareilles douleurs ! J’ai pleuré avec elles pendant de longues heures ; puis, le cœur noyé de compas sion, il m’a fallu les quitter pour revenir auprès d’Yseult. Maurice, je voudrais t’avoir auprès de moi, je suis très inquiète I Dans ma dernière lettre, lorsque je te parlais de l’état de santé de notre petite amie, je croyais encore à une crise passagère que des soins et le temps suffiraient à calmer. Hélas ! chaque heure semble apporter une aggravation à son mal. T’en ai-je dit l’origine: Il y a une dizaine de jours, Yseult avait passé l’après-midi àBellombre, chez son amie Berthe Lassagne ; revenant à travers les jardins qui séparent les deux pro priétés, elle fut surprise par un violent orage et vit la foudre frapper et incendier devant elle un grand arbre. Terrifiée, elle quitte le petit Droits de reproduction et de traduction réservés....