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Le Temps, 8 janvier 1900

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Le Temps
8 janvier 1900


Extrait du journal

Nous ne toucherons â la procédure d'audience du conseil de guerre que pour demander que les sentences soient motivées. Les officiers et même les simples gradés sont astreints à libeller le mo tif de la punition laplus légère. Laplupart d’en tre eux excellent dans ces libellés qui sont sou vent des modèles de conscience et de précision. Ils sauront parfaitement motiver les décisions judiciaires qu’ils sont appelés à rendre. Si tes jugements sont motivés, il devient difficile d’in troduire le vote au scrutin secret. Nous nous en consolons aisément, car la garantie d’indépen dance qui résulte du secret du vote est presque illusoire, les juges ayant forcément échangé entre eux leurs impressions au cours des débats. M. Dietz propose de faire présider le conseil de guerre par un membre du Icorps permanent de la justice militaire. Nous redouterions un peu la trop grande autorité que ce spécialiste, écarté depuis de longues années de la vie militaire, exercerait sur ses collègues. Mais si l’on place dans les rangs élevés de l’armée un assez grand nombre d’officiers ayant acquis, à un moment de leur carrière, la pratique du droit pénal mili taire, on pourra tout naturellement les appeler à la présidence des conseils de guerre, sinon ex clusivement, du moins de préférence à leurs collègues du même grade, en vertu d’un roule ment dont les règles seraient posées par la loi. La législation en vigueur n’accorde au con damné militaire d’autre recours que le pourvoi devant le conseil de révision composé d'un gé néral et.de quatre officiers supérieurs, assistés d’un commissaire du gouvernement. C’est là une des portions les plus généralement con damnées du Gode de 1857. Le conseil de révi sion est dépourvu de toute compétence pour traiter les questions purement juridiques dont il est saisi. Quand un premier président de Cour d'appel est nommé à la Cour suprême, il lui faut un apprentissage assez laborieux pour s’ini tier à la matière, très spéciale, de la cassation. Par quelle grâce d’état les cinq juges du conseil de révision se trouveront-ils, du jour au lende main, capables d’apprécier et d’appliquer les plus subtiles théories du droit? Il faut donc, comme le propose le projet du gouvernement, porter devant la Cour de cassation les pourvois militaires. Rien de subversif dans cette innovation, puis que, dès maintenant, le garde des sceaux a le droit et, par conséquent, le devoir de demander à la Cour de cassation d’annuler les jugements militaires où il relève une violation de la loi. Le condamné militaire a la faculté de signaler au ministre delà justice les cas de cassation qu’il croit rencontrer dans son affaire. Pourquoi ne tes signalerait-il pas directement à la Cour de cassation? .. Un soldat lésé dans le plus léger de ses inté rêts matériels, qui réclame à propos de la fixa tion du chiffre de sa solde ou d’un débit qui lui est imputé peut déférer au Conseil d’Etat la dé cision du chef de l’armée. Un officier mis en ré forme, après avis d’un conseil d’enquête, ale droit de s’adresser au Conseil d’Etat. Si un juge ment de conseil de guerre le destitue de son grade, le condamne à l’emprisonnement ou à la peine de mort, point de recours auprès de l’une des compagnies chargées de connaître les lois et de les faire respecter. La réforme ne com porte donc pas d’objection sérieuse. ‘ Pour que les conseils de guerre n’échappent pas à la surveillance des chefs de l’armée, il conviendra de placer au-dessus des commis saires du gouvernement des officiers de grade élevé, chargés de prendre connaissance des dé cisions militaires et de proposer au ministre de la guerre tes mesures qui assureront l’unité et la correction de la jurisprudence militaire. Bien entendu, les réformes que nous venons de proposer ne s’appliquent qu’à la procédure suivie en temps de paix. Les règles spéciales aux conseils de guerre réunis en présence de l’ennemi demeureront intactes....

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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