Extrait du journal
— Les voilà tous déjà à baguenauder, les fainéants !* * Triste temps que le nôtre! Combien c’était différent jadis! On savait se conduire, on savait sentir alors! Le pays était franche ment divisé en deux camps. Jeunes et vieux *se passionnaient pour la cause; et si les uns étaient obligés d’aller surveiller leur bien, les autres restaient aux aguets a la maison; nul n’aurait songé seulement, à flâner sur les bancs de la place, pendant que l’ennemi peut prépa rer dans l’ombre quelque mauvais coup. Des ennemis! Sait-on seulement aujourd’hui ce : que veut dire ce mot? Les gens d’Oronou ont oublié de haïr et d’aimer... ils ont écouté la voix des autorités; le préfet et l’évêque ont eu raison des vieux souvenirs de famille que rien ne devrait effacer; les anciennes inimitiés sont mortes; la mollesse, la. décadence sont tombées sur le pays. Toute la journée, les hom mes jouent à la mora comme des enfants, et les vieillards demeurent accroupis sur les bancs de, ‘pierre, morts déj à avant de fermer les yeux pour toujours!... Branlant la tété sous son bizarre manteau noir, la petite vieille descendit les marches, tra versa la place. Le vent agitait lés branches des arbres dépouillés qui se détachaient sur le fond brillant du ciel comme de grands polypes dans1 l’eau. Le froid était vif; mais les paysans bar-, bus et robustes, au visage rouge, aux yeux très noirs, aux dents très blanches de gens bien portants, ne paraissaient pas en souffrir. Avec leurs vêtements d’orbace (I), leurs peaux de mouton, leur capuchon rabattu sur le long bonnet de laine, ils avaient l’air d’hommes d’un autre âge, et le dialecte presque entièrement fait de latin qu’ils parlaient augmentait cette illusion. Les femmes qui traversaient la place pour aller à la fontaine, encapuchonnées elles aussi dans leur jupe relevée à l’arabe, saluaient la vieille à son passage, non sans agrémenter leur bonjour de quelque commentaire jovial. — Vous voilà levée de bien bonne heure, Zia Giuseppa Fiore! — Où allez-vous donc si pressée? — Si j’avais autant d’écus que vous, je res terais dans mon lit jusqu’à midi, moi ! — Zia Giuseppa Fiore, vous allez à l’église? Priez le bon Dieu qu’il nous envoie bientôt de la chaleur. i — Bien des compliments à votre voisin, M. * ‘ • ■ ‘ • 'X- U), Etoffe.de..laine^groseière, - '...
À propos
Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.
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