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Le Temps, 19 janvier 1893

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Le Temps
19 janvier 1893


Extrait du journal

L’officieux Popolo romano, qui avait été un si chaud défenseur de la Banque romaine, est obligé, au jourd’hui, de faire amende honorable et de recon naître qu’une partio des révélations du député Colajanni, que lui-même avait traitées d’infamies, étaient au-dessous de la vérité. 11 ajoute que le gouvernement était dans l’ignorance absolue de ce qui se passait ; sans quoi, il n’aurait pas présenté la loi prorogeant de six ans le privilège des banques d’émission. Il ajoute que la constatation de cette situation grave n’est pas le résultat de l’inspection gouvernementale à laquelle on procède actuelle ment, mais des négociations pour la fusion avec la Banque nationale, fusion qui ne pouvait se faire que sur la base d’un inventaire sérieux de l’actif et du passif de la Banque romaine. C’est cet inven taire qui a fait constater la nécessité de procéder rapidement à une liquidation, en prenant des me sures sauvegardant, autant que possible, l’intérêt public et celui des actionnaires. Je ne veux pas entrer dans le détail des irrégula rités ; mais elles sont nombreuses et graves. Les journaux se demandent ce que faisait le commis saire du gouvernement qui, suivant la loi, doit être attaché à chaque banque d’émission. Le marquis di Rudini a déposé une demande d’in terpellation sur la question des banques, et on pré voit une lutte sérieuse contre le ministère, qui a de mandé une prorogation du privilège des banques sans connaître exactement leur situation. Les journaux de l’opposition jouent à M. Giolitti et à M. Miceli un méchant tour en reproduisant leurs discours du 20 décembre dernier contre M. Colajanni. L’impression dans le public est énorme. Le gouvernement a pris des mesures afin que la place de Rome n’ait à ressentir aucune secousse. 1 1 1 11 ~ ' 1 ' S’il" est un projet de loi qui ne parût guère de nature à soulever de vives discussions, c’est, assurément, celui par lequel le gouver nement, déférant au voeu de l'opinion, avait demandé d’accroître là faculté d’émission fiduciaire accordée à la Banque de France. On se ferait difficilement une idée, cependant, des passions que ce projet a éveillées hier, à la Chambre. Rarement on vit débat plus agité, majorité plus hésitante, votes plus contra dictoires. Rappelons en quelques mots, l’objet de la discussion ; on aurait peine à en concevoir de moins compliqué. L’Etat, à un moment où il redoutait une circulation excessive, prit la précaution, pour rassurer le public, de fixer un maximum à l’émission des bil lets. Ce maximum, relevé à diverses repri ses en raison des nécessités commerciales, se trouve atteint ou peu s’en faut, si bien que le public est menacé de ne plus obtenir les billets qu’il réclame : la Banque de France ne peut plus lui délivrer que de l’or ou de l’argent. Il s’ensuit « une gêne sérieuse et pour les commerçante et pour les particu liers »; ces expressions sont de M. Camille Pelletan, qui a même ajouté, hier : « Cette difficulté, nous ne songeons pas à la nier ; cet inconvénient, nous ne songeons pas à le contester ». Dans ces conditions, pouvait-on songer à obliger le public à se passer des billets qu’il demande et à se charger de la monnaie-métallique encombrante dont il ne veut pas ? Le bon sens ne conseillait-il pas de reculer tout simplement la limite d'émis sion, de façon à mettre fin à la « gêne » si gnalée? Le projet de loi n’a pas eu d’autre raison ; il n’a pas eu d’autre but, et l’on pouvait croire qu’il rallierait l’unanimité des suffrages. Comment donc se peut-il qu’il ait été si violemment attaqué ? C’est ce que nous allons tâcher d’expliquer. Le texte du projet de loi ayant été em prunté au projet général sur le renouvelle ment du privilège, il s’est trouvé, tout d’abord, quelques députés pour s’imaginer sérieusement que le gouvernement essayait d’enlever par surprise une faveur dont la Chambre avait ajourné l’examen. De cette idée préconçue à une accusation directe adressée au gouvernement de s’être fait le complice d’une tactique inavouable, il n’y avait qu’un pas. L’air ambiant est à ce point saturé de défiances et de calomnies, que le ministre des finances a dû apporter à la tri bune cette protestation indignée : « J’ai vingt deux ans de vie parlementaire, s’est écrié M. Tirard, et plus de sept années de minis tère : jamais je n’ai travaillé qu’à découvert et la tête haute. » Et comme on avait jeté le soupçon sur le gouvernemeur de la Banque de France, le ministre a poursuivi en ces termes : « Le gouverneur est un des plus honnêtes et des plus galants hommes qu’on puisse trouver. » Par ce seul mot, M. Magnin était vengé amplement; mais on sent à quelles émotions regrettables, à quelles surprises fâcheuses, pouvait donner lieu un débat engagé dans de telles conditions. Puis, d’autres membres ont affirmé que, si l’Etat permet une émission .plus large, la Banque en retirera un profit : sur 500 mil lions d’affaires nouvelles, au taux de 3 0/0, n’aura-t-elle pas réalisé un bénéfice supplé mentaire de 15 millions? M. Pelletan s’est attaché à cette thèse. La réponse était trop aisée, et de nombreux orateurs la lui ont faite. Si la Banque ne pouvait réaliser ces affaires qu’en se servant de billets, elle re tirerait, en effet, du surcroît d’émission une...

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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