Extrait du journal

dès lors, ne pas essayer de s’accommoder des faits, et même d’en tirer parti, au lieu de se raidir contre ce qu’on n’a aucun moyen d’empê cher? ' On dit que le recrutement du clergé va deve nir très difficile et que-la nouvelle loi « tarit les vocations dans leur source». Eh quoi! parce que les jeunes lévites passeront une année sous les drapeaux, le vide se fera dans les sémi naires ? Les vocations ne résisteront pas à la .fréquentation des camarades de régiment? Ce serait leur supposer une inquiétante fragilité ; une foi qui menacerait de se flétrir au moindre contact profane ne serait guère vivace et n’au rait pas des racines bien profondes dans le cœur du futur clerc. Mais on exagère évidem ment. Les vocations sérieuses demeureront fer mes, et même se fortifieront à l’épreuve de la caserne. Quant aux autres, quant aux vocations indécises, chancélantes, est-ce un grand mal que le service mette en évidence leur vanité? Si l’on s’expose à quelques pertes au point de vue de la quantité, il y aura sûrement bénéfice au point de vue de la qualité. Ün dit encore que la loi nouvelle est une loi de persécution. Dans l’état actuel de l’Europe, il est indispensable que la nation tout entière soit armée et que chaque citoyen valide soit capable de contribuer efficacement à la défense nationale. Cette obligation absolue du service militaire personnel est incontestablement une gêne pour de nombreuses carrières : elle con trariera une foule de jeunes gens qui se desti nent à des professions laïques ; elle sera une charge également pour ceux qui veulent embrasser l’état ecclésiastique. On exige du pa triotisme des uns et des autres le même effort et le même dévouement. Ajoutons que l’on n’a pas exclu systématiquement tout tempérament. On s’est efforcé de tenir compte des intérêts ides hautes études. Une partie des jeunes gens appelés ne servira que pendant une année : or les élèves ecclésiastiques sont précisément au nombre de ces privilégiés. On a donc mau vaise grâce à se plaindre de la dureté de la loi ; ce que l’on appelle une I.oi de persécution apparaît, en réalité, comme une loi de trans action. Au surplus, est-il démontré que le régime de la caserne ne présente que des dangers pour les futurs prêtres? En quittant, pendant une année, la serre chaude du séminaire, en fréquentant, dans un commerce quotidien, des camarades sortis du peuple, des fils d’ouvriers et de paysans, ne pourront-ils pas recueillir une multitude d’observations, faire sur le vif des études de caractères et des analyses de sentiments qui leur seront plus tard d’un pré cieux secours dans l’exercice de leur minis tère ? Quoi qu’il en soit, ce qui paraît incontestable, c’est que le clergé, en se montrant conciliant et respectueux de la loi, ferait preuve de bonne volonté et de patriotisme, et obtiendrait l’ap probation de tous ceux qui souhaitent sincère ment, en ce pays, la pacification religieuse. * LETTRES DE BELGIQUE...