Extrait du journal

patience, de courage, de luttes contre elle-même^ contre ses faiblesses, contre ses tendresses même, avant d’arriver à ce résultat, un fils qui ne fût pas seulement l’enfant banal d’une mère quelconque, de toutes les mères, mais, ainsi que le disait Germain Talman, un fils qui fût quel qu'un. Dès leur arrivée à Paris, dès que, installés , définitivement dans cet appartement du quai de la Tournelle, ils s’étaient peu à peu habitués à leur nouvelle existence, Fernand Rozel avait paru grandir brusquement, comme s’il eût enfin senti sous ses pieds le terrain solide, élastique et résistant qui lui convenait pour assurer sa destinée. Non pas qu’il eût changé grand’chose à leurs habitudes provinciales, car tous deux, la mère et le fils, étroitement unis, avaient continué à mener la même existence de calme, de paix, de travail régulier et presque d’isolement que par le passé. En province, en dehors de quelques voisins, de quelques camarades de Fernand, ils ne voyaient personne. A Paris, ils. trouvèrent une affection qui leur avait manqué jusque-là, à cause de l’éloigne ment, de différentes circonstances, et qui rem plaça toutes les relations un peu vagues, un peu disséminées, un peu incolores de la provinee : ce fut celle du parrain de Fernand Rozel, un très ancien ami de la famille de sa mère, qu’ils avaient été longtemps sans voir, à cause de ses voyages, de ses travaux, des nécessités le fixant et le retenant à Paris. Germain Talman, qui, dans sa jeunesse, avait d’abord fait de la médecine, plutôt par amour de la science que pour la pratiquer, s’était en suite passionné pour l’antiquité, et ses décou vertes, ses fouilles, ses études n’avaient pas tardé à le mettre à un des premiers rangs de l’Egyptologie. Une place de sous-conservateur des antiqui tés égyptiennes au musée du Louvre, en le ré compensant des nombreux services rendus, lui assurait une vie tranquille au milieu des mer veilles qu’il avait contribué à faire connaître et apprécier. Du jour où le jeune homme fit sa connais sance, renouant des liens jusque-là bien déten-. dus, puisque Talman n’avait presque pas revu son filleul, depuis la lointaine époque où il lui avait servi de. parrain, ce fut une révélation pour Fernand....