PRÉCÉDENT

Le Temps, 27 juin 1911

SUIVANT

URL invalide

Le Temps
27 juin 1911


Extrait du journal

Notre correspondant de Rome nous télégraphie : • La princesse s’est éteinte doucement hier soir, à cinq heures quarante-cinq, entourée de ses enfants, les princes Napoléon et Louis et la princesse Laeti tia, ainsi que des reines Maria-Pia et Marguerite et de la princesse Clémentine. L’immobilité de la princesse, sa respiration imperceptible laissaient, depuis des heures, douter si elle vivait encore. Quand enfin le docteur Masso, 'qui était penché sur la mourante, dit simplement : « La princesse Clotilde vient d’expirer f » les deux reines ont éclaté en sauglots, tandis que les religieuses qui se trou vaient dans la chambre s’agenouillaient pour dire les prières des morts. Après avoir longuement prié devant le lit mortuaire, les reines, la princesse Laetitia, qui veillait sa mère depuis huit jours, la princesse Clémentine et les princes se sont retirés. La nouvelle a été télégraphiée au roi et à la reine, aux dignitaires de l’Etat, au Sénat, à la Chambre. Cette fin était prévue depuis plusieurs jours, car la maladie qui avait frappe la princesse rhiver der nier avait continué son œuvre de destruction et achevé de ruiner un tempérament affaibli par l’âge et les rigueurs d’une vie monacale. En effet cette .fille de roi occupait dans sa résidence une simple chambre plus simplement meublée encore d’une ta ble, de quelques chaises, d’un prie-Dieu; d’un petit lit de fer, et les seuls ornements de cette pièce étaient un portrait du prince Napoléon et les photo graphies de ses enfants et de la famille royale. Le roi partira aujourd’hui pour assister aux ob sèques de sa tante ; il sera accompagné du prési dent du Sénat, qui dressera l’acte de décès. A Tu rin, comme à Moncalieri, partout des drapeaux en berne sont arborés en signe de deuil. La princesse Clotilde de Savoie (Marie-ThérèseLouise), fille de Victor-Emmanuel II, roi d’Italie, est née le 2 mars 1843, à Turin. A l’âge de seize ans elle fut mariée au prince Napoléon, cousin de ■l’empereur des Français (1859). Qn peut dire que ce mariage, tout politique, ne fut qu’un symbole visible de l’alliance franco-italienne. On ne pou vait en effet imaginer des époux, moins assortis ; que la princesse Clotilde, renfermée, silencieuse, ! austère, « d'une Vertu à faire, peur », disait-on un peu rai'lleüsement, de plus très dévote, et le prince Napoléon, hardi d’esprit, libre penseur, d’une in crédulité affichée, ardent à tous les plaisirs de la vie. La princesse Clotilde vécut pendant ses années de Paris très retirée en son Palais-Royal et parut peu aux Tuileries où elle était dépaysée. Epouse très digne, mère parfaite, elle était entourée de tous les respecté. Elle a eu trois enfants : le prince Victor Napoléon, né en 1.862, le prince Louis (1864) et la princesse Laetitia (1866). La princesse Clotilde, malgré la chute de l’Em pire, resta à Paris tant que le prince Napoléon y habita. En 1872 le prince fut expulsé par M. Thiers; la princesse le suivit à l’étranger. Mais plus tard, , quand il put rentrer, la princesse se retira au château de Moncalieri, près de Turin. Bile y vécut désormais comme en religion. Quand la nouvelle fut connue à la Chambre, tous les députés se levèrent et restèrent debout pen dant que le président prononçait l’éloge de la prin cesse. « Tous les Italiens, a-t-il dit, pleureront la mort de la princesse éminente par ses vertus de fille, d’épouse et de mère. » Son nom restera uni de la manière la plus écla tante.aux origines de la résurrection nationale. » J’envoie, a dit en. terminant le président, les con doléances sincères et affectueuses de la Chambre à ses fils, au roi et à la famille royale. » Les approbations unanimes et- ; chaleureuses de toute la Chambre ont accompagné les paroles du président, auxquelles s’est associé le président du conseil Giolitti au nom du gouvernement. M. F. Martini a très heureusement rappelé la joie produite en Italie par l’annonce du mariage de la princesse avec un Napoléon, qui scellait une alliance jusqu’alors seulement espérée. Il a fait remarquer aussi que la nouveUe de la - mort de la princesse était connue le jour anniversaire de celui où se répandit la nouvelle de la victoire de Solfés rino, comme pour rappeler les destinées que senoces avaient promises à l’Italie et qui se sont ac complies....

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

En savoir plus
Données de classification
  • saurel
  • monis
  • lavisse
  • briand
  • caillaux
  • ernest lavisse
  • clemenceau
  • victor duruy
  • f. martini
  • masso
  • eddy
  • monne
  • italie
  • france
  • paris
  • tonkin
  • allemagne
  • londres
  • chambre
  • strasbourg
  • sorbonne
  • sénat
  • vie privée
  • bt
  • union postale
  • collège de france
  • ligue des paysans
  • la république
  • parlement
  • cir