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Le Temps, 27 octobre 1892

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Le Temps
27 octobre 1892


Extrait du journal

La sentence arbitrale que M. Loubet vient de rendre dans l’affaire de Carmaux ne pouvait être, en vérité, autre que ce qu’elle est. Nous voulons dire que les prin cipes de notre droit public nfen permet taient aucune autre. Il faut hautement fé liciter M. le président du conseil de n’avoir pas cherché, par de subtils et habiles com promis, à flatter l’une ou l’autre des parties en présence, mais de les avoir mises toutes les deux en face de ce que veulent nos lois, et, avec nos lois, dans le cas présent, le ben sens et l’équité. Ni l’une ni l’autre ne triomphent entièrement ; mais ni l’une ni l’autre n’ont aucune raison sérieuse de se trouver lésées, car ce que l’autorité arbitrale qu’ils avaient invoquée leur impose est la juste reconnaissance de leurs droits res pectifs, tout aussi bien que la condamnation de leurs prétentions excessives dans le pré sent ou de leurs erreurs de conduite dans le passé. Plus on voudra examiner cette triple sentence, plus il semble impossible que les parties en cause n’en reconnaissent la haute impartialité. Elle s’impose vérita blement moins encore par l’autorité morale de celui qui l’a rendue que par l’esprit de raison et de justice qui l’a dictée. Défini avec précision par les mandataires des ouvriers et de la compagnie, le différend qu’il s’agissait d’arbitrer portait sur trois .points. Les ouvriers de Carmaux par l’or gane de MM. Clemenceau, Pelletan et Mille rand demandaient la réintégration de M. Calvignac, celle de tous les ouvriers en grève sans exception, enfin le remplacement du directeur des mines M. Humblot. La compagnie jusqu’à présent repoussait ces trois conditions au nom du règlement par-*ticulier des mines de Carmaux et au nom de son droit. Sur le premier point, M. Loubet lui a donné tort. Il a tenu à dégager nette ment l’indépendance du suffrage universel et il a voulu qu’il ne pût pas y avpir même un soupçon à cet endroit. Le fait d’être nommé maire ou conseiller municipal ne peut évidemment pas constituer une raison de renvoi. Reste la question pratique de concilier ensuite les devoirs du maire et les charges de l’ouvrier. La solution naturelle,c’est un congé provisoire honorablement accordé. Telle est la solution arbitrale de M. Loubet. Sur le second point, les ouvriers obtiennent encore, au moins en gros, satisfaction. Tous les grévistes rentreront dans la mine, sans qu’il soit ou puisse être distingué entre les chefs ou meneurs et les autres. Toutefois, une exception est faite qui ne pouvait pas ne pas l’être : Sont exclus du bénéfice de cette sentence les ouvriers condamnés par le tribunal d’Albi pour des délits de droit commmun. Il était impossible, en effet, au chef du gouvernement de paraître annuler de son autorité privée des décisions judiciaires régulièrement rendues. Mais la compa gnie, évidemment, garde le droit par devers elle, de rouvrir la mine à ces condamnés à l’expiration de leur peine. Et il n’y a pas à douter qu’elle y sera portée et le fera dans la mesure qu’elle jugera compatible avec la sécurité et l’intérêt de son entre prise. Enfin, sur le troisième point, l’arbitre dé boute les ouvriers de leur prétention. En core ici il n’en pouvait être autrement. En réalité, aucun grief n’était articulé contre M. Humblot. Fallait-il le punir des torts que les ouvriers avaient eus à son égard, en violant son domicile et en le menaçant de mort? Donc le directeur des mines est main tenu. Mais encore ici, le point de droit une fois établi et mis hors de contestation, il reste à savoir ce que, en fait, le directeur et la compagnie jugeront sage de décider sur ce point, pour faciliter à Carmaux le com plet retour des esprits au calme, à l’état norpial des choses. Nous devons donc espérer que les ou vriers. résistant enfin à de mauvais conseils, accepteront la sentence arbitrale qu’ils ont provoquée. Ils peuvent et doivent se dire que, sur le point principal, satisfaction pleine et entière leur est donnée. Dans la presse qui a pris parti pour eux, dans leurs réunions publiques, dans les discours de leurs défenseurs à la Chambre, on a dit et crié que la vraie cause de la grève, c’était la défense du suffrage universel. Il fallait faire respecter le suffrage universel par la compagnie. Si toutes ces protestations et apologies étaient sincères, la grève va ces ser immédiatement ; car la sentence de M. le président du conseil, en réintégrant M....

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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