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Le Temps, 30 novembre 1900

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Le Temps
30 novembre 1900


Extrait du journal

de rester un élément de progrès social, le jour où elles apparaîtraient comme un moyen com mode de placements sûrs pour les fortunes, même modestes. Au lieu de stimuler, les initia tives privées, elles les rendraient plus pares seuses. L’agriculture, le commerce, l’industrie se verraient enlever des ressources qui leur sont indispensables pour leur renouvellement incessant. Ainsi, à ce premier point de vue, il y a lieu de veiller toujours à ce que les dépôts effectués aux caisses d’épargne conservent leur caractère spécial, soient enfermés dans des limites étroi tes, ne dépassent pas un maximum assez rigou reux. Un second ordre de considérations com manderait encore plus, s’il se peut, la même vigilance. En effet, la réunion de toutes ces peti tes épargnes ne tarde pas à constituer une dette dont le montant total risque de devenir peu à peu formidable. Sans doute, en théorie, l’Etat n’en est pas directement responsable, au moins s’il s’agit décaissés d’épargne privées. En outre, l’emploi des fonds recueillis est entouré do tant de garanties que les déposants sont certains de recouvrer, quand ils le voudront, leur argent. Néanmoins, on ne voit pas sans quelque ennui le niveau de cette dette s'élever indéfiniment. 11 a suffi, à certaines heures, de passions politi ques surexcitées pour que des spéculations malsaines fussent entreprises sur les paniques publiques trop aisées à provoquer. Les précau tions sont telles que le mal causé ne saurait, à vrai dire, aller bien loin; cependant, la pru dence veut qu’on réduise le plus possible ce danger et, pour y réussir, le moyen le plus effi cace, évidemment, ce sera encore d’imposer aux versements une limite sévère. Voilà tout l’esprit de la loi du 20 juillet 1895. Voilà, en ce qui .concerne notamment l’article 4 de cette loi, les raisons pour lesquelles il a été décidé que «le compte ouvert à chaque dépo sant ne peut pas dépasser le chiffre de 1,500 francs ». On voulut, toutefois, apporter des tempéra ments à Ta stricte application de cette clause. Afin de ne surprendre personne, afin d’agir sans brusquerie, on admit, dans ce même arti cle 4, la disposition suivante : « Les comptes qui, au moment de la promulgation de la présente loi, dépasseront le chiffre de 1,500 francs, de vront être ramenés à la limite maxima de 1,500 francs dans un délai de cinq ans à partir du 1er janvier qui suivra la promulgation de la présente loi ». Les déposants ont donc eu près de cinq ans et demi pour se conformer à la loi du 20 juil let 1895. Aucun d’eux ne saurait se plaindre de voir, désormais, cesser la faveur exceptionnelle et toute transitoire que, par pure bienveillance, l’Etat avait concédée. Il fallait une sanction à la limite nouvelle. La fin de l’article 4 l’a établie en ces termes : « Si, à l’expiration dudit délai, cette prescription n’a pas été exécutée, le compte sera ramené à 1,500 francs, au moyen d’un achat de rente sur l'Etat effectué d'office et sans avis préalable. » L’avis étant donné, en fait, depuis plus de cinq ans, nul ne sërait fondé à soutenir que l’avertissément n’a pas été suffisant. Aussi pourrait-on se demander si le débat soulevé au Sénat était bien désirable. La plu part des caisses d’épargne ont eu soin de rap peler, dans ces derniers temps, à leur clientèle, les dispositions de la loi de 1895. Nous avons sous les yeux une note publiée par l’une d'elles dans le journal local ; on y vise l’obligation de ramener à 1,500 francs, au plus, le maximum du dépôt, et la note ajoute: « Si, avant le 1er janvier iOOil, les déposants n'ont pas réduit à ce maximum le montant de leur livret par une de mande de remboursement, il y sera ramené dès les premiers jours-de, janvier au moyen d’un achat de rente sur l’Etat effectué d’office et sans avis préalable. Ceux qui préféreraient obtenir le remboursement en espèces de cet excédent plutôt qu’en un titre de rente devront se pré senter, avant le 31 décembre, et, dans ce cas, le conseil des directeurs les engage, pour la facilité du service, « à ne pas attendre ce dernier délai ». Il serait difficile de donner des instructions plus claires. Il paraît, pourtant, que quelques personnes se sont demandé si la loi de 1895 serait appli quée. Ce sont.de ces questions qui, en temps normal, ne se poseraient même pas: comment une loi, non abrogée et dont personne ne ré clame l’abrogation, ne serait-elle pas respectée? Des doutes ont-ils pu, vraiment, naître à la suite de l’envoi par le ministre du commerce à un préfet, en juillet dernier, d’une lettre où l’on peut lire cette observation : « Je vous prie de faire remarquer au conseil des directeurs que, la loi précitée ayant accordé aux déposants pour réduire leurs livrets un délai de cinq ans qui expire le31 décembre prochain, la caisse d’épar gne ne saurait leur imposer, avant la date susindiquée, la réduction dont il s’agit qui devra, dès lors, s’accomplir dans les premiers mois de l’année prochaine ». Certes, cette phrase pouvait prêter à une équivoque, si l’on n’avait pas présent à l’esprit le texte si net delà loi. Celle-ci n’accorde en aucune façon plusieurs mois après le 31 décembre 1900 pour que la réduction qu’elle ordonne soit opérée. De plein droit, le 1er janvier 1901, la réduction aura eu lieu. Mais M. Millerand s’est défendu parfaitement hier, d’avoir en rien entendu violer la loi de 1895 ; il avait simplement voulu dire « que, pour l’application de cette réduction des excédents, un certain délai serait forcément imparti aux caisses d’épargne ». ....

À propos

Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.

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