Extrait du journal
Le rapport annuel sur la situation et les travaux de l’université de Paris (1898-1899) a été rédigé cette année par M. Petit, do Julleville, professeur à la Faculté des lettres. C’est assez en faire pressentir les mérites et l’intérét. Il a été approuvé hier par le conseil de l’Université et il sera. publié dans. quel ques jours. ‘ Nous pouvons dès aujourd'hui en tirer quelques indications dignes d’étre notées. Une première constatation, c’est que depuis trois ans, le nombre des étudiants immatriculés, qui de puis 1890, ne cessait de s’accroître et atteignait ën 1896 le chiffre énorme de 14,654, diminue suivant une progression qui s’accélère d’année en année d’une façon sensible. En 1897, cette diminution n’é tait que de 21 ; en 1898, elle était de 287 ; en 1899, elle s’élève à 575, en sorte que le chiffre total n’est plus que de 13,771. Le rapporteur s’explique cette diminution par l’opinion qui s’est généralisée dans les familles de l’encombrement des carrières dites libérales et la préférence accordée aux études d’un caractère plus pratique et d’un profit plus immé diat et plus sûr. Pour établir la vérité de cette expli cation générale, il faudrait prouver que le nombre total des étudiants, dans l’ensemble des universités françaises a diminué également, et cela, n’est pas encore démontré. Nous apercevons une autre cause. La diminution constatée à Paris a commencé l’année môme où ont été constituées les universités régionales. Ces uni versités ont pris tout de suite une grande vigueur, au moins les plus importantes. Celles de Lyon, de Nancy, de Lille, de Montpellier se sont développées à tous les égards. Elles attirent et retiennent sur tout davantage les étudiants de leur ressort. L’afflux menaçant, dont Paris s’effrayait, a été arrêté du coup. Parmi les avantages que nous attendions de la loi qui a constitué ces universités en foyers de culture autonomes, se trouvait celui d’opérer une réelle décentralisation scientifique. Cette attente est justifiée par les faits. La province s’en réjouira, tous les bons citoyens s’on applaudiront et l’Uni versité de Paris ne s’en plaindra pas. La qualité des études y gagnera. Commo le dit très justement le rapporteur, « il y aura toujours assez d’étudiants ; jamais il n’y aura assez de bonnes études, ni trop de science ». Sait-on bien dans le public ce que représente l’université de Paris? Il y a, ou du moins, il y avait l’an dernier, pour près de 14,000 élèves, 255 maîtres, dont 129 professeurs titulaires et 126 adjoints, char gés de cours ou maîtres de conférences. C’est en core beaucoup trop peu. Toutes les Facultés deman dent des compléments d’enseignement nécessaires. L’Etat ne pouvait exaucer leurs vœux. Maîtresse d’un budget qui s’élève à près de 1,700,000 francs, l'université de Paris n’a pas hésité à réaliser des créations d’enseignements nouveaux. Elle y a con sacré déjà .une somme annuelle de 100,000 francs. La Faculté de droit a reçu une chaire magistrale du droit public romain et un cours d’histoire des traités; la Faculté de médecine, un agrégé pour Jes accou chements, et, grâce au concours du Conseil munici pal, elle aura bientôt une chaire de gynécologie et une chaire de chirurgie infantile ; la Faculté des sciences, une chaire de physique et une d’histolo gie ; la Faculté des lettres, une chaire de l’histoire de l’art, un cours do l’histoire des civilisations et un autre de psychologie expérimentale ; l'Ecole de pharmacie, deux emplois nouveaux d’agrégé. Le dé veloppement de l’enseignement scientifique était la seconde promesse de la loi constitutive des univer sités autonomes. On voit que cette promesse encore est tenue. La troisième était que des dons ne manqueraient pas de venir à ces universités. Il en est venu déjà de considérables à celles de province et à celle de Paris. Il ne s’agit pour le moment que de celle-ci. Le comte de Chambrun lui a fait unè riche donation pour créer à la Faculté de droit un enseignement d’économie sociale comparée et à la Faculté des let tres une chaire de l’histoire de l’économie sociale. La baronne do Hirsch lui a confié une somme de 50.000 francs pour instituer une caisse dito « prêts d’obligeance » aux étudiants qu’un accident de for tune arrêterait dans leurs études. L’Union coloniale lui a garanti pendant six ans une rente annuelle de 3.000 francs. Un anonyme a mis à sa disposition pour une durée indéterminée 75,000 francs par an pour cinq bourses de voyage autour du monde. Près de 10,000 francs ont été donnés aux laboratoires. M. Maurice Lonquety lui a laissé la station de biologie maritime de Wimereux. Enfin, le don le plus magni fique a ôté celui que lui a fait M. Bischcffsheim : l’observatoire de Nice avec son installation admira ble et ses dépendances, plus une somme de 2,500,000 francs dont la rente doit servir à l’entretien de cet établissement, en tout et d’un seul coup une somme de plus de 5 millions. Si l’on songe que l’université de Paris existe comme toile depuis deux ans à peine, on peut juger de ce que l’avenir lui réserve; La bourgeoisie française, si généreuse, comprendra bien vite qu’elle a autre chose à faire que de fonder à l’Institut des prix de vertu ou des prix de littéra ture morale qui se changent en stériles aumônes. A toutes ces ressources nouvelles, il faut joindre celles que lui apportera la Société des amis de l’u-niversitô do Paris qui s’est constituée l’an passé sous la présidence de M. Casimir-Perier. Elle compte déjà 800 membres. Il faut qu’elle en recrute plu sieurs milliers. Terminons ce trop rapide aperçu par une juste remarque que son érudition historique a permis à...
À propos
Le Temps, nommé en référence au célèbre Times anglais, fut fondé en 1861 par le journaliste Auguste Neffzer ; il en fit le grand organe libéral français. Il se distingue des autres publications par son grand format et son prix, trois fois plus élevé que les autres quotidiens populaires. Son tirage est bien inférieur à son audience, considérable, en particulier auprès des élites politiques et financières.
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