Extrait du journal

Les Parisiens s'en sont allés Les Parisiens s'en vont ît Pâques. Ils s'en vont du reste toute l'année et on ne parle jamais de leur retour. Il v a des mystères qu'il ne faut pas éclaircir. Si l'on admet que l'exode vers la Côte d'Azur constitue le dernier départ, on peut dire que les Parisiens commen cent à partir pour les fêtes de Pâques. Donc la mobilisation des trains - bat actuellement son plein. Le mauvais, temps ne change rien à cela. L'essentiel est de s'en aller et les Parisiens s'en vont. Dans les gares, c'est la cohue des grands jours. Les aspirants voyageurs stationnent en longues files devant les guichets. On se bouscule. Les hauts par leurs annoncent les heures de départ des trains. On voit des couples courir, des enfants se,faire traîner, des maris grogner après leur femme, et des fem mes s'énerver de l'impassibilité de leur mari. Ali I la joie des départs . Et les trains s'en vont. Ils partent dans toutes les directions. Ils vont voir les campagnes, les moutons, les champs, les petites rivières qui chantent libre ment sur leur lit de cailloux. Ils tra versent des villages endormis, et d'au tres en pleine effusion pascale. A cha que station des voyageurs descendent. Effusions. Joie de se retrouver. Fêtes de famille et banquets. C'est inouï comme la période des fêles de Pâques est prolifique pour les trains. Ils se multiplient comme par en chantement. Sur les grandes lignes on les double, on les triple, on les quadru ple même. Dans l'espace de deux ou trois heures, cinq trains partent pour la même ville. En une seule journée on en compte quarante-cinq de supplémen taires pour Lille, le Tréport et Bruxelles. Les rapides et les express partent toutes les cinq minutes. Les grandes villes s'efforcent de battre des records. Dieppe arrive aveo dix trains, Cher bourg en a vingt, et Le Havre gagne avec vingt-trois. Malgré cela nombreux sont les voya geurs qui ne trouvent pas de place pour s'asseoir et doivent effectuer le trajet debout. Dieu, que les valises et les pa quets sont encombrants dans les cou loirs. Sans doute parce que tous ces trains supplémentaires ne suffisaient pas, le? compagnies organisent des trains de plaisir pour Lisieux, Londres... Et, ce qui est surprenant, après cet exode infernal, c'est qu'il'reste encore quelqu'un à Paris pour en parler. P. B....