Extrait du journal

Vendredi 15 Octobre 1869. X... La presse continue à s’occuper encore de la manifestation des irréconciliables, mais c’est pour constater son complet avortement. Le Rappel en sera donc pour ses frais quant à la campagne insurrectionnelle qu’il prêchait avec tant d’ardeur, et qui ne lui aura servi qu’à le couvrir de ridicule ; c’est un fiasco dont il pourra profiter à l’avenir. En revanche, nous ne saurions assez félici ter les promoteurs de la manifestation ; ils don nent une grande preuve de bon sens en rccon naissant leur erreur, et en s’éloignant assez tôt du bourbier dans lequel ils allaient fatalement se fourvoyer. Du reste, nous devons dire que la rédaction de la feuille révolutionnaire, en esquissant le plan stratégique de la manifestation du 26 octo bre, avait compté sans le bon sens et l’esprit d’ordre de la population parisienne ; — car, dans une réunion publique, tenue au boulevard de Clichy, un des orateurs s’est chargé d’ap prendre aux principaux rédacteurs du Rappel que, dans leur famille, on connaissait mieux les Travailleurs de la mer que les travailleurs de Paris. « Nous n’entendons, a-t-il dit, obéir à aucun mot d’ordre, d’où qu’il puisse venir, et nous ne nous soucions pas de servir de com parses aux beaux messieurs de la jeunesse dorée. » Que doivent penser de cette déclara tion les divers membres de la famille Ilugo? L’échec de l’équipée du 26 octobre nous permet d’apprécier les beaux résultats obtenus par la libre discussion de cette question dans la presse ; car, on ne peut le contester, c’est à elle que l’on doit l’avortement de la manifestation projetée. — Le gouvernement n’aura pas ainsi attendu longtemps pour recueillir les fruits de ses réformes libérales. — La presse libre a porté la lumière sur la tentative des irréconci liables, et le sentiment public en a fait, ajoute la France, bonne et prompte justice. La Liberté, dans un article plein de bon sens, se félicite de son attitude si sage et si modérée en présence de l’incident constitution nel si malencontreusement soulevé par M. de Kératry. — « Instruite, dit-elle, par l’expé rience , la presse parisienne en prenant ainsi très résolument et presque unanimement parti pour la liberté contre la révolution, pour la dis cussion contre l’insurrection, aura pleinement racheté, et au-delà, les torts de deux ou trois journaux qui persistent aveuglément à rester à l’état de fâcheuses exceptions. » — « Détrac teurs de la liberté, ajoute-t-elle en finissant, soutenez donc encore qu’elle est plus nuisible qu’utile ! » Le Réveil est toujours le même. — Ne voilà-t-il pas aujourd’hui qu’il vient nous dire avec un sang-froid superbe qu’il persiste...