Extrait du journal

La Fille de Don Juan Par M. Adolphe FAVRE. (Suite). IX Bientôt une rumeur se fit sur la place. — La voici ! la voici 1 disait on de tous côtés. Et un tonnerre d'applaudissements accueillit Juana qui accourait, tenant sous son bras une mandoline dont elle tirait quelques accords. Juana était ce soir-là dans tout l’éclat de sa splendide beauté. Le costume qu’elle portait lui seyait à ravir. Sa robe de soie noire pailletée d’or ne lui descendait que jusqu’au genoux, laissait voir une jambe ron le et bien faite, terminée par un pied mignon et délicat que des bottines rouges en cuir d’Alger emprisonnaient. Sur le sommet de sa tête, voilant ses cheveux bruns, était atta chée à une épingle, d’or sa mantille blanche qui lui tombait sur les épaules, et venait, ainsi qu’un nuage vaporeux, plutôt en faire briller qu’en ca cher la charmante nudité. Juana s’arrêta au centre de la place, et aussitôt le c-rcle se forma autour d’elle. Elle joua sur sa mandoline un court prélude et chanta la romance suivante. DIEU VOUS GARDE I Quand un homme, à votre oreille, Sous la treille, Viendra murmurer tout bas : <« La seule femme que j’aime, » C’est toi-même ; » Enfant, ne le croyez pas 1 En parlant, s’il vous regarde, Prenez garde 1 Vous verrez que son œil ment. L’œil est le miroir de l’âme, Et la femme Lit dans l’œil de son amant. Là-bas, la bouche muette, Un poète Courbe son front soucieux ; Sa vie est tout un mystère ; Sur ld terre On dirait qu’il rêve aux deux....