Extrait du journal

C’est par une accumulation de fautes graves que le ministère est arrivé à la triste position où il se trouve réduit en ce moment. L’orgueil et l'enivrement de ses triomphes électoraux expliqueraient seuls sa conduite imprudente, si le dédain, nous devrions presque dire la haine qu’il a pour le parti de l’op position et peut-être aussi les engagemens contractés envers certains cabinets prépondérans de l’Europe, n’en donnaient le secret. Le ministère s’étail lié par des promesses solen nelles , et il ne les a pas tenues. Le ministère, en se présentant, l’année dernière, à la chambre, escorté, soutenu parjune majorité de cent vingt voix , pouvait se montrer généreux ; et i! ne s’est servi des élémens de sa force que pour opprimer la minorité parlementaire, que pour étouffer dans son germe toutes les propositions dont ses adversaires prenaient l’initiative. Le ministère pouvait recueillir les avantages d’une réforme électorale et parlementaire spontanément offerte, et il n’a cessé de poursuivre la glorification d’un système d’aveugle résistance à toute vue de progrès. Le ministère pouvait reconquérir une partie de sa popularité perdue, affaiblie , par l’inauguration d’une politique franche, loyale, véritablement grande et sympathique aux sentimens de la nation ; et il s’est attiré l’animadvcrsation publique , en fondant sa puissance sur la corruption et eu conspirant avec les souverains despotiques contre la liberté des peuples. Le Portugal, la Suisse et l’Italie proclament la honte de sa diplomatie, comme la Pologne en proclame l’illogisme et la couardise. Un dernier acte devait combler la mesure de ses fautes. Les imprudentes paroles qu'il a placées dans la bouche de la couronne et l’atteinte qu’il porte au droit de réunion des citoyens, consacré, garanti par nos lois , ont achevé de le déconsidérer dans l’opi nion publique. Ses partisans mêmes l’abandonnent à son déplorable sort, car dans son aveuglement il s’est avancé jusqu’à la limite extrême où il ne lui est plus permis de faire un seul pas sans mettre le pied dans l'abîme. Qu’on en juge ! L’année dernière le ministère obtenait cent trente et quelques voix de majorité sur une question de cabinet ; celle année il n’en obtient que dix-sept, et c’est la peur qui les lui donne !... Est-il une position plus étrange, plus anormale et plus désespérée ?...